Connaissez-vous “la Gratinée des Halles” ou “la soupe d’ivrognes”, d'anciens plats appréciés des Rois ?

Par Alexandre M

Bon nombre de plats, pâtisseries et autres délices sont nés à Paris et continuent encore aujourd’hui de régaler Parisiens, Parisiennes et les nombreux touristes pour qui un séjour dans la capitale ne serait pas complet sans un peu de gourmandise. Derrière leur invention, la plupart de ces recettes imaginées ou popularisées à Paris ont quelque chose à raconter sur l’histoire de la Ville Lumière…

Un plat populaire rendu célèbre par un roi ?

Grand classique de la cuisine française, à tel point qu’on la retrouve encore aujourd’hui à la carte de nombreux établissements, la soupe à l’oignon fait partie du patrimoine parisien. Car, si la soupe à l’oignon classique est d’origine lyonnaise, la version gratinée est, elle, typiquement parisienne. Pendant longtemps, la cote de popularité de la soupe à l’oignon n’était pas au beau fixe, car elle était vue comme un plat bon marché composé de jus de bœuf, de bouillon, de pain et d’oignons, un légume qui se cultive facilement et donc très accessible. Dès l’Antiquité, les Romains y voyaient un plat pour pauvres, d’où son nom “la soupe des pauvres”. Tenace, la recette doit attendre le XVe siècle pour voir son image être redorée suite à une légende impliquant Louis XV. Dormant dans sa loge de chasse, le roi se serait réveillé affamé dans la nuit et aurait alors confectionné une soupe avec les oignons, le beurre et le champagne qu’il avait à sa disposition. Pour les plus sceptiques à l’idée de voir le roi cuisiner lui-même, une théorie plus crédible veut que Stanislas Leszczynski, duc de Lorraine et père de la reine de France, ait, après avoir goûté la soupe à l’oignon dans une auberge de Champagne, souhaité apprendre “à en préparer une semblable” avant de populariser la recette à la cour de Versailles. De “soupe des pauvres” à “soupe du roi”, il n’y a donc qu’un “léger” pas de quelques siècles !

Un classique présent dans de nombreux établissements de la capitale © Alamy

De quoi réconforter le “Ventre de Paris”

Après avoir séduit Versailles, encore faut-il séduire Paris. Une mission qui va porter ses fruits, grâce à un lieu emblématique de la capitale : les Halles. Ce qui était au départ un simple marché alimentaire à ciel ouvert fondé au XIIe siècle s’est rapidement développé, au point de devenir “le Ventre de Paris”. Et pour cause : avec près de 25 hectares d’échoppes couvertes, Les Halles attiraient des gens de tout horizon, qu’il s’agisse de vendeurs et acheteurs de produits en gros pour les industries florissantes de la restauration et de l’épicerie. Quant aux plus démunis, ils se dirigeaient vers les marchands d’arlequins, des commerçants qui vendaient les restes des banquets bourgeois. Le plat était on ne peut plus sommaire mais ô combien réconfortant : une soupe à l’oignon basique avec du jus de bœuf, du bouillon, des oignons et du pain. Ce n’est qu’au XIXe siècle que des restaurateurs eurent l’idée d’ajouter du fromage râpé et de placer les bols de soupe sous le gril. Ainsi préparée, la soupe était bien plus nourrissante pour les travailleurs et les fêtards noctambules du quartier, et le plat gagna le joli surnom de “Gratinée des Halles”.

Marchande de soupe aux Halles de Paris © Galerie Roger-Viollet

Où déguster les meilleures soupes à l’oignon de Paris ?

Si le grand marché du centre de Paris fut par la suite déplacé à Rungis, c’est toujours en plein cœur de Paris que l’on peut déguster d’authentiques “gratinées”. Comme Au Pied de Cochon, qui fut d’ailleurs le premier établissement de la capitale à obtenir l’autorisation d’ouvrir 24h sur 24. C’est dans cette véritable institution parisienne, très appréciée des Parisiens et des touristes pour son ambiance d’antan et sa cuisine généreuse, que l’on peut par exemple se délecter d’une soupe à l’oignon gratinée, parmi les best sellers, dorée au four et parfaitement assaisonnée. Pour déguster l’une des meilleures soupes à l’oignon de la capitale, si l’on se fie à l’avis des clients, on peut aussi se rendre à deux pas des Vosges, à la découverte d’une brasserie aveyronnaise : le Bistrot des Vosges. On peut également prendre la direction de Pigalle, pour un pur moment de régal, dans une brasserie XXL qui rejoue à la mode d’aujourd’hui l’air des restaurants parisiens inaugurés au XIXème siècle : le Bouillon Pigalle. Mettant à l’honneur le restaurant de tradition, l’établissement propose bien évidemment à sa carte la soupe à l’oignon classique, comme à la maison et à prix mini (3,80€). Enfin, pour ceux qui souhaitent allier gourmandise dans un cadre raffiné, direction la Gare du Nord où, avant d’embarquer, on peut faire une pause au Terminus Nord. Si cet établissement est avant tout réputé pour sa cuisine de brasserie française raffinée axée sur les poissons et fruits de mer, le tout servi dans un cadre Art déco dépaysant, des grands classiques de la cuisine française sont aussi au rendez-vous, à commencer par la soupe à l’oignon. Gratinée “à la parisienne”, celle-ci croustille encore plus de fromage gratiné, dégouline encore plus de fromage fondu et fond sous la dent grâce à des oignons savoureux et un assaisonnement adéquat…