Entre Versailles, le plus majestueux, le Haut-Kœnigsbourg, le plus haut-perché, Villandry, le plus décoratif, ou Chenonceau, le plus poétique, pas évident d’établir un classement des plus beaux châteaux de France. Car, non content de différencier les avantages de chacun, il faut aussi prendre en compte tous ces châteaux méconnus que compte le territoire français et qui pourraient également avoir leur mot à dire dans ce classement. Et pas besoin d’être un château du Moyen Âge ou de la Renaissance pour se mêler à la discussion…
Modeste château devenu villégiature familiale et domaine royal
Contrairement aux nombreux châteaux médiévaux qui peuplent le territoire français et qui ont vu passer d’illustres personnages, de Jeanne d’Arc à Louis XIV, certains édifices sont encore “de jeunes pousses” en comparaison. C’est le cas par exemple du château de Randan, situé dans le département du Puy-de-Dôme, dont la construction remonte “seulement” à 1821. Ou plutôt sa reconstruction, puisqu’un premier château du XVIe siècle existait déjà lorsque, en 1821, Louis-Philippe duc d’Orléans et sa sœur Adélaïde acquièrent le château ainsi que quarante hectares de terrain. Dès l’année suivante, ils commandent la restauration du bâtiment existant et une extension à l’architecte Pierre Fontaine. L’objectif est simple : faire de cette bâtisse de briques bâtie sous François Ier, qui n’a jamais été achevée et située à l’extrémité d’un petit village d’Auvergne, un lieu de villégiature familial et une résidence convenable pour une princesse de la maison d’Orléans. Outre le château, d’autres bâtiments sont construits, à l’image de la maison de l’Inspecteur, les grands communs et une orangerie. Les terres du domaine sont également agrandies, de manière à atteindre 110 hectares à la mort d’Adélaïde d’Orléans en 1847, tandis qu’un magnifique parc paysager est également créé. Très impliqué dans ce projet, Louis-Philippe, futur roi des Français, aurait également vu en cet achat un futur lieu de rêve pour une retraite loin de Paris en cas de péril, préférant un exil auvergnat à une nouvelle émigration. Ironie du sort, il sera pourtant contraint de fuir le pays en mars 1848, pour l’Angleterre où il meurt deux ans plus tard.
Un édifice dénué d’attention pendant très longtemps
Adélaïde étant morte célibataire et sans enfants, le domaine revient au plus jeune fils du roi Louis-Philippe, Antoine d’Orléans duc de Montpensier. Ce dernier le transmet lui-même à sa fille Marie-Isabelle d’Orléans, qui entreprend de redonner au domaine son lustre en y apportant également des aménagements et du confort moderne, comme de l’électricité en 1909 puis l’eau courante en 1912. Un entretien appliqué qui dure jusqu’en 1925, année terrible pour le château qui subit de plein fouet un incendie. 10 ans après avoir été partiellement transformé en hôpital de fortune pendant la Première Guerre mondiale, le domaine est ravagé par ce violent incendie qui laissa énormément de ruines. Les plus belles pièces du mobilier qui ont pu être sauvées du brasier sont transportées en Espagne tandis que le reste, dont de nombreux trophées de chasse de Ferdinand d’Orléans, est entreposé dans les vastes communs du château. Un coup fatal porté au château, qui va progressivement se dégrader jusqu’à être déclaré Monument Historique en état de péril. En effet, aucun travaux ne sera réalisé pendant 75 ans et seul son rachat à la fin du XXe siècle permettra de sauver un monument aujourd’hui sécurisé. De quoi faire profiter aux curieux de son atmosphère romantique et de ses dépendances spectaculaires.
Une plongée efficace dans l’art de vivre du XIXe siècle
Dernier domaine royal construit en France et parmi les rares demeures liées à la Monarchie de Juillet, le château de Randan se révèle être un formidable témoin du luxueux train de vie d’une famille princière au XIXe siècle. Notamment grâce à une partie de son mobilier, soit un ensemble de 3 800 meubles et objets qui correspondent à la part du mobilier sauvé de l’incendie du château en 1925 et resté sur place depuis. Par ailleurs, la collection d’animaux naturalisés de Randan a été entièrement restaurée et inventoriée avec le concours du Muséum d’Histoire naturelle Henri Lecoq, offrant ainsi aux curieux une imposante collection d’histoire naturelle composée de pièces en provenance du monde entier. Riche de 450 animaux naturalisés par le célèbre taxidermiste Rowland Ward et issus de la collection de Ferdinant d’Orléans, dernier duc de Montpensier, ces animaux sont mis en scène dans des dioramas présentés dans plusieurs pièces du château. Surtout, cette impressionnante collection témoigne de cette activité-phare de la haute société aux XIXe et XXe siècles, à savoir la recherche de beaux trophées. Tandis qu’il accueille divers événements durant l’année, la villégiature du dernier roi de France séduit également par son parc de 100 hectares, fort d’une vue imprenable sur la plaine de la Limagne. Dans la plus pure tradition du jardin paysager du XVIIIe siècle et annonciateur des évolutions de l’art des jardins sous le Second Empire, celui-ci se démarque en conjuguant parfaitement les influences françaises, anglaises et italiennes. Autre point de passage obligatoire une fois à l’extérieur : la grande orangerie construite vers 1835 et les serres, répliques de celles de Versailles aujourd’hui disparues. Preuve ultime que recevoir est un art parfaitement maîtrisé au domaine royal de Randan !
Domaine Royal de Randan
1 rue Adélaïde d’Orléans
63310 Randan
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Image à la une : Domaine royal de Randan © Didier Hirsch