L'imposant château des Rohan reconstruit à la demande de Napoléon III fut surnommé le “Petit Versailles alsacien”

Par Alexandre M

À ne pas confondre avec le château de Pontivy, parmi les derniers châteaux forts construits en Bretagne et caractéristique de l’architecture militaire bretonne de la fin du XVe siècle, le château des Rohan, situé à Saverne, a été depuis le début du Moyen-Âge la propriété et le siège de l’épiscopat strasbourgeois.

L’aboutissement de quatre châteaux successifs

Ce qui était d’abord un château médiéval fut transformé en résidence par Robert de Cotte au XVIIIe siècle, elle-même détruite par un incendie en 1779. Le cardinal Louis René Édouard de Rohan, propriétaire du château, décida alors la construction d’un palais plus somptueux que l’ancien. Un somptueux édifice de style néoclassique dont le cardinal de Rohan ne put profiter, étant entraîné dans l’affaire du collier qui secoua la cour royale et le contraignit à terminer sa vie en exil. Par ailleurs, la Révolution française met un terme temporaire aux travaux. Délaissé jusqu’au Second Empire, le château doit sa conservation à Napoléon III, qui le fait achever pour y loger les veuves des hauts fonctionnaires décédés dans l’exercice de leur fonction. Ce monument qui était jadis en ruines devient alors le “Petit Versailles alsacien”, cet édifice majestueux à la façade néoclassique et parmi les plus grands châteaux de France. Quatrième château d’une série de monuments qui se sont succédé à cet emplacement depuis le Moyen-Âge, le bâtiment est transformé après la guerre franco-allemande de 1870 en caserne et accueille, après le retour du territoire à la France en 1918, le 10e Bataillon de chasseurs à pied. Depuis 1945, l’édifice est propriété de la Ville qui, en plus d’assurer son entretien, y a installé de nombreux équipements culturels.

Entrée du château côté ville © Ralph Hammann

Une collection historique parmi les plus importantes de la région

Un château parmi les plus emblématiques de la région Alsace, reconnaissable par sa façade (côté parc) en grès rose de style néo-classique, qui se déploie sur 140 mètres de long, soit l’équivalent à l’horizontal de la hauteur de la Cathédrale de Strasbourg. Les passionnés d’histoire se rassemblent au Château des Rohan pour son Musée, demeure de riches collections archéologiques gallo-romaines et médiévales découvertes à Saverne et dans les environs. Non content d’être le plus ancien musée municipal d’Alsace derrière ceux de Strasbourg et Colmar, celui-ci se compose de trois sections : art et histoire, Louise Weiss et archéologique. Tandis que la première recouvre de nombreux domaines tels que les peintures, arts graphiques, sculptures sur bois polychrome des XVe et XVIe siècles provenant des églises de Saverne et de sa région et une salle consacrée à l’histoire du château, la seconde est dédiée à la journaliste alsacienne Louise Weiss, qui a fait don dans les années 80 de ses collections (objets ethnographiques, peintures, dessins, arts décoratifs des XIXe et XXe siècles, archives personnelles). Les salles consacrées à Louise Weiss permettent de comprendre les prémisses de la construction européenne en découvrant les projets politiques d’avant-garde qu’elle a soutenu entre 1919 et 1934 dans sa revue de politique internationale l’Europe Nouvelle. Enfin, la section archéologique, située dans les caves voûtées du château, abrite une riche collection de stèles funéraires et votives gallo-romaines.

Musée du Château des Rohan © Office de Tourisme du Pays de Saverne

Une destination privilégiée pour les amoureux d’histoire et de nature

Abritant également une auberge de jeunesse, une école primaire, une salle de spectacle, ainsi que des salles de conférences et de réunions, le Château des Rohan n’est donc plus seulement un château, mais une véritable mini-cité. L’un des endroits privilégiés pour en admirer toute la beauté est assurément le parc adjacent au Canal de la Marne au Rhin. Dessiné par Robert de Cotte avant l’incendie de 1779, celui-ci comprenait un dispositif de deux vastes terrasses descendant vers le parterre de broderie. Statues et vases ornaient ces différents espaces, de même que le potager, les bosquets, le boulingrin et le jardin agreste. Quant au canal, tracé en ligne droite vers l’est, il s’étirait à perte de vue sur une longueur totale de quatre kilomètres. Comme une invitation à découvrir cette ville à la frontière avec la Lorraine, qui regorge de monuments dignes d’intérêt. En se dirigeant vers la Grand Rue, rue principale piétonne de la ville, on peut par exemple admirer en face du château le symbole de la ville : la fontaine de la licorne, datant de 1837. Quelques mètres plus loin, une somptueuse maison à colombages de 1575 avec un oriel de 3 étages confère à la rue un charme d’antan, de même que l’église Notre-Dame, dont le porche abrite un Christ en croix de 1756. Enfin, l’ancien Couvent des Récollets, abritant un magnifique cloître gothique du XIVe siècle et des fresques du XVIIe siècle, et la roseraie, riche de 7500 pieds pour rappeler que Saverne est considéré comme la capitale de la rose, font aussi partie des étapes incontournables.