C’est l’un des arrondissements les plus réputés de la capitale, et pourtant, il était autrefois le quartier général des mendiants et des escrocs… On y trouvait d’ailleurs la Grande Cour des Miracles, qui a inspiré Victor Hugo dans son roman Notre-Dame de Paris.
Une géographie sociale
Sous l’Ancien Régime, ce que l’on appelle la “Cour des Miracles” regroupe un ensemble d’espaces de non-droit dispersés dans différents quartiers des villes. À Paris, cette appellation serait apparue sur les plans établis par Jacques Gomboust en 1652 et Jean Boisseau en 1654. Elle aurait été nommée selon une légende populaire : on racontait que les mendiants qui y habitaient voyaient leurs infirmités disparaître “comme par miracle” dès la nuit tombée. Ces cours, peuplées de personnes défavorisées, se sont peu à peu développées au cours du XVIIe siècle. On en comptait une douzaine dans la capitale, et de nombreuses autres dans les grandes villes françaises.
Des escrocs aux noms inventifs
C’est au sein de l’actuel 2e arrondissement que se trouvait la plus grande Cour des Miracles parisienne. Dans son ouvrage Histoire et recherches des antiquités de la ville de Paris, l’historien Henri Sauval la décrit ainsi : “Pour y entrer, il faut descendre une assez longue pente de terre, difforme, raboteuse, inégale. J’y ai vu une maison de boue à demi enterrée, toute chancelante de vieillesse et de pourriture, qui n’a pas quatre toise carré (60 mètres carrés) et ou logent néanmoins plus de cinquante ménages chargés d’une infinité de petits enfants légitimes, naturels et dérobés”.
Au sein de cette cour, on trouve des mendiants, des voleurs et des prostituées qui étaient répartis selon des catégories bien précises. En effet, les escrocs qui s’y trouvaient avaient un rôle bien déterminé à jouer pour amadouer ou tromper leur victime. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ces rôles avaient des noms bien farfelus ! Parmi eux, les “malingreux” étaient de faux malades, les “marcandiers” étaient de faux marchands ruinés par la guerre, les “coquillards” étaient de faux pèlerins détenant une coquille Saint-Jacques, ou encore, les “orphelins” étaient chargés de trembler de froid.
La “Grande Cour des Miracles”
À l’heure actuelle, la Grande Cour des Miracles occupe plusieurs rues du 2e arrondissement : celle-ci se situait en effet entre la rue du Caire, la rue des Forges, la rue Thévenot, rue de Damiette et la rue Réaumur. On y entrait par la rue Saint-Sauveur, et malgré les apparences, l’ensemble était en réalité parfaitement organisé selon des lois, un langage et des hiérarchies. Tout ce joli monde était d’ailleurs dirigé par un roi, dénommé “le grand Coësre“, qui commandait l’ensemble des mendiants de France, tandis que les “cagous” étaient les chefs de chaque cour.
C’est de cette Grande Cour des Miracles que parle Victor Hugo dans son roman Notre-Dame de Paris. Bien que celui-ci apporte une touche médiévale à son récit, il s’est basé sur les études d’Henri Sauval pour donner forme à ses personnages. L’écrivain décrit cette cour comme un “immense vestiaire, en un mot, où s’habillaient et se déshabillaient à cette époque tous les acteurs de cette comédie éternelle que le vol, la prostitution et le meurtre jouent sur le pavé de Paris”. Cette cour est finalement détruite le 12 août 1784, lorsqu’un édit royal ordonne de les raser pour construire un marché des marées.
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Image à la une : La rue Réaumur – © Adobe Stock