L’évocation de son nom fait encore trembler. Et pour cause, il est l’un des plus grands criminels auxquels la France a eu affaire. Le 26 mars 1998, après avoir semé la terreur sur Paris pendant sept ans, cet homme de 35 ans est enfin arrêté et reconnait avoir violé et égorgé sept jeunes femmes entre 1991 et 1997. Le 05 mars 2001, il est condamné à la réclusion à perpétuité assortie d’une période de sûreté de vingt-deux ans. C’était il y a vingt-deux ans précisément… Alors, que devient le “tueur de l’Est parisien” ? Pourrait-il être libre ?
Une histoire qui avait mal commencé
L’histoire avait mal commencé. Né le 15 octobre 1962 à Vitry-le-François, dans la Marne, Guy Georges, né Guy Rampillon, est l’un des deux enfants non désiré d’Hélène Rampillon, issu d’une relation avec un soldat américain. Il est rapidement abandonné par sa mère et rejeté par ses grands-parents maternels qui estiment qu’il est un enfant illégitime. Il n’a même pas un an lorsqu’elle le place à la DDASS avant de partir vivre en Californie avec son second fils.
En juin 1963, pour faciliter son placement, le petit Guy Rampillon, né à Vitry-le-François, devient Guy Georges (du prénom de son père), né à Angers. Il est adopté par la famille Morin et grandit au milieu de douze autres enfants, dans une famille où les démonstrations d’affection sont rares. Le petit Guy est un enfant doux, intelligent, bien élevé.
C’est à partir de l’âge de 10 ans qu’il commence à révéler un autre tempérament. Passionné par la chasse et solitaire, il se met à traquer et dépecer les animaux des bois alentours. Il commence également à voler de l’argent et à avoir des comportements violents. À 14 ans, il tente d’étrangler l’une de ses sœurs, handicapée mentale, et récidive l’année suivante sur une autre de ses sœurs. Il et alors envoyé en foyer spécialisé.
Un lourd passé criminel
Mais les années se suivent et se ressemblent. En 1979, à la descente du bus, il agresse une jeune femme qui parvient à s’échapper. Il fera alors son premier séjour en prison, mais sera relâché au bout d’une semaine. Rejeté par sa famille adoptive, il se réfugie dans l’alcool, ce qui ne calme en rien sa violence et ses pulsions. En 1980, deux autres jeunes femmes en font les frais, dont l’une poignardée à la joue. Il retourne alors en prison, pour neuf mois cette fois. Lorsqu’il sort, il décide de s’installer à Paris avec l’un de ses frères. Nul ne sait encore qu’il s’apprête à terroriser la ville…
En 1981, alors qu’il a 19 ans, il viole et poignarde une première jeune femme de 18 ans, qui survit miraculeusement. Un non-lieu est prononcé. Quelques mois plus tard, il agresse une autre jeune femme dans un parking souterrain du 16ème arrondissement. Il la poignarde, tente de la violer et de l’étrangler, mais là encore la jeune femme parvient à s’échapper. En juillet 1985, il est condamné à une peine de 10 ans. Mais en janvier 1991, tandis qu’il est placé en semi-liberté, il prend la fuite…
Le tueur de l’Est parisien sème la terreur
Quelques mois plus tard à peine , il suit une jeune fille de 19 ans jusqu’à son appartement pour la violer et l’assassiner sauvagement. En tentant de récidiver un an plus tard, il est arrêté et ramené en prison sans que le lien ne soit fait avec son crime. Il sort en 1994, après un an et demi de détention, et s’en prend sans attendre à une jeune femme de 27 ans, retrouvée violée et torturée dans sa voiture, dans un parking souterrain. Ces deux meurtres ne sont que les premiers d’une longue série, entrecoupée d’agressions et tentatives d’agressions ratées.
En septembre 1995, il est poursuivi pour agression sexuelle après une agression manquée au domicile d’une jeune femme. Il est condamné à trente mois de prison ferme pour ces faits. Les enquêteurs ne savent pas, à ce moment-là, que ce prédateur à la vie de marginal a déjà assassiné cinq femmes ! En effet, bien qu’il agisse selon un mode opératoire, malgré des empreintes génétiques, un portrait-robot, et une perquisition au domicile de Guy Georges où sont saisis des rubans adhésifs similaires à ceux utilisés pour attacher les victimes, la police tarde à regrouper les crimes et agressions. D’autant que l’une de ses anciennes victimes ne le reconnaît pas, ce qui ralentit également l’enquête. L’assassin leur file une fois de plus entre les doigts…
Ainsi, moins d’un mois après sa libération en juin 1997, et au cours des cinq mois qui suivront, celui que l’on surnomme désormais “la bête de Bastille”commet deux nouvelles agressions et deux autres meurtres, qui seront ses derniers…
La fin d’un cauchemar
C’est le juge d’instruction Gilbert Thiel qui va permettre à l’enquête de prendre un tournant décisif. En effet, il exige des experts du laboratoire d’analyses génétiques de Nantes et autres experts en génétique qu’ils réexaminent les 3 500 fichiers conservés en archives et effectuent la comparaison avec l’ADN recueilli sur les lieux du dernier crime. Tout concorde, il n’y a désormais plus qu’à mettre la main sur le tueur en série identifié.
Le 26 mars 1998, après une traque de 24h, et malgré les révélations prématurées de la presse, près de 400 policiers finissent par l’interpeler, place Blanche, dans le 18ème arrondissement parisien. Guy Georges a alors 37 ans. Lors de sa garde à vue, les propos qu’il adresse à la brigade criminelle sont glaçants : “Si je sors, je recommence.” Après trois semaines d’un procès retentissant, le 5 avril 2001, il est condamné à la réclusion à perpétuité assortie d’une période de sûreté de vingt-deux ans… Depuis cette affaire, toutes les empreintes génétiques des délinquants condamnés sont répertoriées dans un fichier centralisé des empreintes génétiques. Une avancée majeure pour la justice.
Guy Georges, libre ?
L’idée fait frémir. Ce redoutable criminel que les peines de prison n’ont jamais empêché de nuire avec une sauvagerie inouïe pourrait-il vraiment être remis en liberté ? Légalement, il pourrait en tout cas faire la demande de libération conditionnelle depuis mars 2020. Pourtant, à ce jour, il n’en a formulé aucune, en accord avec les propos qu’il avait adressés aux familles des victimes à l’issue de son procès : “Je vais m’infliger une peine. Je ne sortirai jamais de prison. Vous pouvez être tranquilles.”
II reste donc incarcéré à la prison d’Ensisheim, en Alsace, aux côtés d’autres criminels considérés comme les plus dangereux, parmi lesquels Michel Fourniret, Francis Heaulme, Émile Louis, Nordahl Lelandais, et plus récemment Jonathann Daval, condamné en 2017 pour avoir tué sa compagne, et qui aurait, selon sa mère, noué des liens d’amitié avec Guy Georges. Comme c’est le cas pour la plupart des tueurs en série, des dizaines d’admiratrices lui écriraient régulièrement, il aurait même tissé quelques relations amoureuses sérieuses…
De quoi, peut-être, lui donner un jour l’envie de revenir sur ses propos et d’envisager une nouvelle vie à l’extérieur ? Quoi qu’il en soit, même s’il en faisait la demande, celle-ci pourrait tout à fait ne pas aboutir, comme c’est par exemple le cas pour Tommy Recco, plus vieux détenu de France. Condamné à deux reprises à la réclusion criminelle à perpétuité, l’homme aujourd’hui âgé de 88 ans a vu sa vingtaine de demandes de libération conditionnelle rejetées. Le tueur de l’Est parisien a donc encore de beaux jours devant lui… en prison.
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Crédit photo en une : Eric Hadj/SIPA
Mélina Hoffmann