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Avant d’être une ambassade, ce superbe hôtel du XVIIe siècle fut une clinique psychiatrique pour célébrités et artistes !

Hôtel de Lamballe © Paris ZigZag

Certaines adresses emblématiques de Paris comme le Louvre ou le Palais de l’Élysée sont la preuve qu’un bâtiment peut avoir mille vies, encore plus à Paris. D’une gare devenue un musée ou d’un ancien palais devenu lui aussi un musée aux millions de visiteurs chaque année, il n’y a qu’un pas. Et lorsqu’il s’agit des reconversions, les hôtels particuliers ne sont pas en reste. Ces prestigieuses demeures, qui ont pu appartenir à un comte ou un prince, sont devenues au fil des siècles des hôtels de ville, des galeries d’art ou des bureaux d’affaires. Mais tout ça n’est rien à côté des rebondissements qu’a connu cet hôtel particulier du 16ème arrondissement…

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Une demeure digne des plus beaux palais 

En se rendant au 16 avenue de Lamballe, on ne peut que remarquer cette façade de style classique au-dessus de laquelle flotte le drapeau turc. Et pour cause : c’est ici, à l’hôtel de Lamballe, que siège l’ambassade de Turquie à Paris. C’est en 1945 que la nièce de l’ambassadeur turc de l’époque, Numan Menemencioğlu, découvre par hasard l’hôtel de Lamballe et l’incite à le louer pour le compte de la délégation turque. Le bâtiment sera finalement racheté par la république de Turquie en 1951, avant qu’un nouvel édifice soit construit en 1972 sur la parcelle pour accueillir la chancellerie de l’ambassade. Tandis que des statues ornent le parc, une pièce semblable à une grotte se trouve sous la terrasse. En forme de coquille Saint-Jacques, elle est pavée d’une mosaïque réalisée à partir de galets et accueille une fontaine de marbre rose. Une construction que l’on doit au duc de Lauzun, propriétaire des lieux au début du XVIIIe siècle. Avant cela, le site accueillait un couvent au XVe siècle puis une maison, au XVIIe siècle. En 1653, le conseiller du roi, Claude Chahu, rachète la demeure et fait construire le corps de logis principal en face de la Seine, reliant les bassins du parc à l’alimentation de la source de Passy voisine. Devenu un lieu mondain, la propriété gagne encore en cachet sous la direction du financier François Berthelot, qui y ajoute un pavillon de billard, une orangerie et un mur côté Seine, isolant ainsi l’hôtel de la chaussée reliant Paris à Versailles.

Toile de Grevenbroeck, où l’on peut apercevoir la Folie en briques rouges © Musée Carnavalet
Toile de Grevenbroeck, où l’on peut apercevoir la Folie en briques rouges © Musée Carnavalet

Des “Folies” du XVIIIe à un asile de renom

Propriété de la princesse de Lamballe, grande amie de Marie-Antoinette, l’hôtel conserve alors le nom de cette éphémère propriétaire, qui meurt pendant la Révolution en 1792, lynchée par la foule. Passé quelques propriétaires, l’hôtel de Lamballe ouvre un nouveau chapitre de son histoire en devenant… l’une des cliniques psychiatriques les plus réputées et huppées de Paris ! C’est en 1846 que le docteur que le psychiatre renommé Esprit Blanche s’installe dans cet ancien hôtel particulier. Celui qui consacre son travail aux maladies mentales voit en cette grande bâtisse aux nombreuses dépendances et son vaste parc le lieu parfait pour accueillir sa nouvelle maison de santé. À l’époque, les asiles privés sont une sorte de privilège, principalement destinés aux classes riches. Comme dans tout asile, on y pratique alors des saignées, on soumet les malades à des expériences de mort imminente, on les enferme et l’on use même de camisoles de force et de tourniquets pour remettre leur esprit en place. C’est sous la direction du fils Émile Blanche et son successeur le docteur Meuriot que l’établissement va accroître sa réputation. Si les punitions sont sévères en cas d’écart, l’établissement propose désormais une hôtellerie de qualité. Très vite, le lieu attire les mondains et les artistes et de nombreuses célébrités vont ainsi y séjourner, tels que le compositeur Charles Gounod, la comtesse de Castiglione, maîtresse de Napoléon III ou le poète Gérard de Nerval. C’est également ici que Guy de Maupassant y décède le 6 juillet 1893, des suites de la syphilis.

Plaque située avenue de Lamballe, juste devant l’ambassade © Wikimedia Commons
Plaque située avenue de Lamballe, juste devant l’ambassade © Wikimedia Commons

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Ambassade et diplomatie, les maîtres-mots du bâtiment désormais

S’il n’y séjourne pas, Guillaume Apollinaire mentionne le lieu dans Le Flâneur des deux rives (1918), en évoquant les “frondaisons touffues qui débordent du grand jardin de la vieille maison de santé du docteur Blanche, toute une végétation luxuriante qui jette une ombre fraîche sur le vieux chemin”. Ce vieux chemin, c’est d’ailleurs la rue Berton, qui longe l’hôtel mais également la maison de Balzac, célèbre musée consacré à l’écrivain. Au début du XXe siècle, l’asile pour aliénés est un lointain souvenir tant la bâtisse est au bord de la ruine. Sous la direction de la comtesse Helen Victoire Crocker, le bâtiment est entièrement reconstruit et seules subsistent les 19 marches du perron originel. La suite est on ne peut plus sombre pour le bâtiment, qui est réquisitionné par la Gestapo pendant la Seconde Guerre mondiale. Après le conflit, l’hôtel accueillera à nouveau des têtes connues, du cinéaste Jean de Limur à l’actrice Danielle Darrieux, en passant par ​​le général Dwight D. Eisenhower, futur Président des États-Unis. Aujourd’hui, après le couvent, la demeure de princesse ou l’asile, c’est donc l’ambassade de Turquie qui fait rythmer les murs de cet hôtel méconnu de Paris,  parfait témoignage de cinq siècles de relation diplomatique entre la Turquie et la France.

Le drapeau turc flotte fièrement sur ce monument historique depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale © Pymouss
Le drapeau turc flotte fièrement sur ce monument historique depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale © Pymouss

 

Hôtel de Lamballe
17 rue d’Ankara
75016 Paris

 

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Image à la une : Hôtel de Lamballe © Paris ZigZag

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