Il y a tout juste cent ans, le 23 novembre 1924, Jean Jaurès entrait au Panthéon. L’occasion de revenir sur cette figure majeure du socialisme français, à la fois professeur, député et journaliste fondateur du quotidien L’Humanité. Fervent défenseur de la classe ouvrière, il engage une grande partie de sa vie à donner « à toutes les intelligences libres le moyen de comprendre et de juger elles-mêmes les événements du monde », jusqu’à son assassinat par un nationaliste, le 31 juillet 1914.
Premiers pas philosophiques
Né le 3 septembre 1859 à Castres, Jean Jaurès grandit dans une famille de la petite bourgeoisie, propriétaire d’une exploitation agricole. Après de brillantes études, il est remarqué par l’inspecteur général Félix Deltour, qui le soutient pour son entrée à l’École normale supérieure de Paris. Reçu troisième à l’agrégation de philosophie en 1881, il devient par la suite professeur dans différents établissements à Albi, puis à Toulouse.
Conversion au socialisme
Dès la naissance de la IIIe République, Jean Jaurès s’affirme comme un soutien de Jules Ferry en étant élu député républicain dans la nouvelle Chambre. Battu en 1889, il reprend finalement ses activités d’enseignant à Toulouse tout en rejoignant le Conseil municipal et en signant plusieurs articles dans la Dépêche.
Autrefois réticent au socialisme, il commence alors à fréquenter la classe ouvrière, et soutient explicitement les grèves des travailleurs dans ses textes. Fâché contre un gouvernement républicain privilégiant l’industrie au détriment des personnes, il s’engage de nouveau et est élu député socialiste à Carmaux. Célèbre pour ses engagements – notamment en tant que dreyfusard –, Jaurès devient une figure politique majeure et l’un des fondateurs du Parti socialiste français en 1902.
Un journalisme engagé
Formé à la philosophie, Jean Jaurès a très tôt privilégié l’écriture pour défendre ses idées politiques et humanistes – sa thèse, intitulée De la réalité du monde sensible, en est la preuve. Après avoir collaboré avec La Dépêche, il devient codirecteur du journal socialiste La Petite République, avant de fonder le quotidien L’Humanité en 1904. Dans son premier éditorial, celui-ci explique vouloir donner « à toutes les intelligences libres le moyen de comprendre et de juger elles-mêmes les événements du monde » pour pouvoir mener une lutte des classes.
Des combats humanistes
Jaurès a une approche personnelle du socialisme, dans laquelle tout le monde ne se retrouve pas. Sa pensée se mêle au marxisme et se présente comme une continuité de l’esprit chrétien qui place au plus haut les idées de justice et de fraternité. Dans ses articles, celui-ci défend à plusieurs reprises l’importance de l’éducation et s’oppose explicitement à la peine de mort. Ses propos peuvent toutefois tendre vers un idéalisme spirituel qui s’éloigne d’un véritable combat révolutionnaire.
Face aux guerres, il garde une position plus ambiguë, se présentant comme un pacifiste pourtant favorable à la constitution d’une armée défensive. Toutefois, c’est bien son engagement contre l’arrivée de la Première Guerre mondiale qui pousse l’étudiant nationaliste Raoul Villain à l’assassiner de deux coups de feu dans un café parisien, le 31 juillet 1914.
Romane Fraysse
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Image à la une : Discours de Jaurès au Pré-Saint-Gervais, lors de la manifestation contre la loi des Trois ans, 25 mai 1913 ; photographie de Maurice-Louis Branger.