« De mémoire d’Homme, jamais nous n’avons connu d’hiver aussi rude. », c’est ce qu’annonça William Derham, un philosophe britannique du 18ème siècle. De fait, l’apocalypse que nous allons vous relater n’a pas uniquement touché la France. Si vous avez des ancêtres européens, vous faites partie des générations survivantes ! À Paris et jusqu’en Hongrie, ce que l’on nomme « le Grand Hiver de 1709 » a été une véritable apocalypse, dans une époque où toutes nos commodités n’existaient pas.
Une apocalypse froide
Tout commence dans la nuit du 5 au 6 janvier 1709 : de l’Angleterre à la Russie, de l’Italie à la Scandinavie, le monde s’est réveillé totalement gelé : si vous avez vu Le Jour d’Après du réalisateur Roland Eimmerich, c’est tout comme ! Cette terrible apocalypse va, en plus, s’étendre sur trois mois.
Il fait -20 C° : la nature ne tient pas, et c’est un désastre dans un monde où plus de la moitié de la population vit de ses récoltes. Puisque les sols gèlent à plusieurs mètres de profondeur, beaucoup d’arbres fruitiers meurent et chutent. Certes, les maisons avaient des cheminées, mais le bois s’achetait et bon nombre de paysans n’avaient pas assez d’argent ! Le gel s’engouffrait dans les maisons qui, jadis, n’étaient absolument pas isolées. Sur les places des villages de France, de grands feux étaient allumés, mais à quoi bon ? Lorsque les malheureux rentraient chez eux, ils risquaient de mourir de froid en s’endormant. On se demande s’il y a eu des survivants, dans ces jolis villages de montagne, où l’altitude n’a certainement pas été une alliée à ce moment-là .
Survie difficile
Au 18ème siècle, des riches aux plus pauvres, tous avaient des stocks de nourriture. Mais à quoi servaient-ils s’il était impossible de garder un feu chez soi ? Puis, on ne conservait pas les aliments de la même manière ! Le pain, cÅ“ur de l’alimentation, gelait aussi. Comme une mauvaise blague du destin, seuls les alcools forts ont résisté : whisky, rhum, vodka (pour ceux qui en avaient). Or, on le sait tous, l’alcool ne réchauffe pas en vérité, et si quelques personnes ont pris la décision d’en boire de trop, il est clair qu’ils n’ont pas vu printemps !
À l’époque, Louis XIV était au pouvoir. Autant dire que le Roi Soleil rêvait que son étoile lui vienne en aide ! En tant que souverain, il avait des feux à profusion dans ses immenses cheminées, qui servaient à « dégeler » le plus de mets possibles, dont le vin. Figurez-vous qu’en étant transporté d’une antichambre à une autre, les bouteilles gelaient aussi ! Vous vous en doutez, à Paris, les prix ne faisaient qu’augmenter : se réapprovisionner relevait aussi du miracle. Imaginez : à Venise, on se baladait en patins à glace, les gondoles étaient figées.
Paris coupée du monde
Comme bon nombre de grandes villes qui fonctionnent sur l’échange et l’exportation, Paris a été totalement coupée du monde pendant 3 mois. Cette apocalypse en fut d’autant plus rude, car on estima qu’il fit -25 C° ! Bien évidemment, la Seine a gelé et certains disent que la mer commençait à se figer. Les registres évoquent plus de 30 000 morts, rien qu’à Paris, et plus de 10 000 à Lyon ! La population fut contrainte de brûler son mobilier, pour espérer retrouver de la chaleur. On se protégeait avec la peau de ses bêtes, qu’on perdait également.
Malheureusement, à la fin de cet hiver désastreux, Paris et la France entière ne furent pas épargnés pour autant. Les températures sont restées très basses jusqu’aux mois d’avril et la fonte des glaces laissa place à des inondations et des maladies. Les famines furent grandes, et même si Louis XIV ordonna de distribuer des céréales aux plus démunis, cela n’aida pas à calmer les survivants, qui firent de nombreuses émeutes ! De 1709 à 1710, des épidémies frappèrent l’Europe.
On peut le dire : nos ancêtres ont été de vrais battants !
Andréa G.
Photo à la une : Paris sous la neige © AdobeStock