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Le Muséum national d’histoire naturelle, quatre siècles au cÅ“ur du vivant

Au cœur du jardin des plantes, le Muséum national d’histoire naturelle est l’un des plus importants centres de recherche et d’enseignement de la capitale. En abritant plus de 62 millions d’espèces dans ses nombreuses galeries, il détient l’une des plus riches collections du monde. Une ambition qui ne date pas d’hier, puisqu’il accueillait déjà au XVIIe siècle l’un des plus importants jardins botaniques de l’époque.

Du jardin botanique au cabinet d’histoire naturelle

Si le Moyen Âge s’intéressait de près aux plantes médicinales, leur culture était souvent limitée aux Horti sanitatis situés dans les monastères et les universités. C’est à la Renaissance que le jardin botanique incarne l’idéal humaniste en étant conçu à travers une classification plus scientifique des espèces végétales. C’est dans ce mouvement intellectuel que s’inscrit Guy de La Bosse, l’un des médecins du Louis XIII qui parvient à le convaincre de créer un Jardin royal des plantes médicinales sur la terre d’Alez. Situé au sud-est de Paris, la propriété comprend un château entouré d’un grand parc.

Ouvert au public en 1640, le nouveau jardin accueille plusieurs milliers de plantes utiles à la santé, mais aussi à la recherche pour les futurs médecins ou enseignants. Au sein des cultures, des cours de botanique, de chimie et d’anatomie sont alors donnés gratuitement par des « démonstrateurs » en français – et non en latin comme cela se faisait à l’époque. Un enseignement moderne qui connaît un fort succès, bien qu’il ne soit pas au goût de la Faculté de médecine menée par le clergé, qui le condamnera comme hérétique. Mais avec le temps, le conflit s’apaise, et le jardin diversifie ses cultures conservées dans l’ancien château. Dès 1693, Guy-Crescent Fagon, premier médecin du roi Louis XIV, recrute des botanistes réputés tels que Joseph Pitton de Tournefort, Sébastien Vaillant ou Antoine de Jussieu. C’est aussi l’époque du Grand Tour destiné à parfaire l’éducation par des voyages dans tout l’Europe. Fagon encourage ainsi les médecins à traverser l’océan pour importer des plantes tropicales méconnues, comme le caféier.

Frédéric Scalberge, Le Jardin royal des plantes médicinales, 1636

Néanmoins, au tournant du XVIIIe, la médecine par les plantes cède le pas à l’histoire naturelle en vogue. Le lieu est alors renommé « Jardin du roi », et le château devient officiellement le « cabinet d’Histoire naturelle ». Dès 1739, la surintendance est confiée au comte de Buffon, qui en fait l’un des plus grands centres de recherche scientifique de l’époque. Par son action, le Jardin et le cabinet doublent leur superficie, tandis qu’une équipe de prestigieux naturalistes s’y installent et enrichissent les collections.

Le Muséum, un laboratoire de recherche 

Sous les foudres de la Révolution, le Jardin prend son autonomie. En 1793, un décret soutenu par Joseph Lakanal fait naître le Muséum national d’histoire naturelle afin de démocratiser l’accès aux savoirs. Le nouveau directeur et les douze professeurs sont alors garants de l’indépendance de la recherche. Parmi eux, le naturaliste Etienne Geoffroy Saint-Hilaire aura un rôle considérable par son étude de la vie animale. Dès son arrivée, il crée la Ménagerie, l’un des plus anciens zoos du monde qui suscite alors un vif intérêt chez les contemporains. Et bien avant Darwin, il affirme l’existence d’une transformation progressive des espèces au cours du temps. A la même époque, d’autres grandes théories voient le jour, telles que l’invention de l’anatomie comparée et de la paléontologie par Georges Cuvier, les lois de la génétique de Charles Naudin, ou la découverte de la radioactivité par Henri Becquerel.

Pierre Petit,Nouvelles Galeries de Zoologie, vers 1885

Face aux nombreuses explorations, les collections augmentent considérablement, si bien que les espaces du vieux château d’origine ne sont plus suffisants. Entre 1833 et 1837, Charles Rohault de Fleury fonde une nouvelle galerie de Minéralogie, qui s’avère être le premier bâtiment français spécifiquement dédié à un musée. Dans le jardin, l’architecte édifie aussi les deux plus grandes serres composées de structures métalliques et de verre jamais construites à l’époque. Puis, le Muséum s’étend de plus belle entre 1877 et 1889, lorsque Jules André fait construire la galerie Zoologique – actuelle Grande Galerie de l’évolution – ainsi que celle de Paléontologie et d’anatomie comparée.

Et le Muséum n’en était pas à sa dernière conquête puisqu’au XXe, il devient aussi propriétaire du domaine de Chèvreloup, du parc zoologique de Vincennes et du musée de l’Homme, installé au Trocadéro.

Un musée aux millions d’espèces

Les vastes collections du Muséum fascinent très tôt les visiteurs du monde entier, qui découvrent des espèces jusque-là méconnues. Dès 1884, des expositions temporaires sont organisées dans les galeries, dont l’une dévoilait des espèces recueillies jusqu’à 5 000 mètres sous les mers. Aujourd’hui, elles n’en demeurent pas moins impressionnantes. La galerie de Botanique est composée d’un herbier de 57 000 espèces et d’une mycothèque comprenant 4 000 souches vivantes. La collection de fossiles comporte quant à elle plus de 2,7 millions de spécimens dont : 30 000 mammifères, reptiles, oiseaux et poissons, 2,5 millions mollusques, 200 000 plantes fossiles et 30 000 foraminifères.

La galerie de Paléontologie et d’anatomie comparée

Il n’est donc pas étonnant que le lieu accueille plus de deux millions de visiteurs chaque année. Et au-delà de ses nombreuses expositions, il est aussi le seul muséum à être un centre universitaire délivrant un doctorat pour les chercheurs. Un double statut qui perpétue sa volonté initiale d’instruire le public tout en contribuant à développer les connaissances scientifiques.

Romane Fraysse

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