À quelques pas de la gare du Nord et du Sacré-Coeur se niche le quartier et la rue de la Goutte-d’Or. Ancien vignoble particulièrement apprécié, le quartier est aussi le théâtre des aventures et péripéties des personnages d’un célèbre écrivain français…
Les péripéties de Gervaise Macquart
“Au milieu de ces cancans, Gervaise, tranquille, souriante, sur le seuil de sa boutique, saluait les amis d’un petit signe de tête affectueux. Elle se plaisait à venir là, une minute, entre deux coups de fer, pour rire à la rue, avec le gonflement de vanité d’une commerçante, qui a un bout de trottoir à elle. La rue de la Goutte-d’Or lui appartenait, et les rues voisines, et le quartier tout entier” peut-on lire dans le cinquième chapitre de L’Assommoir paru en 1877. C’est en effet dans ce quartier populaire que l’écrivain Emile Zola décide de faire évoluer les personnages du septième ouvrage de sa série : les Rougon-Macquart.
“La rue en pente, à partir du milieu ; étroite, même les trottoirs manquent par endroits ; ruisseaux toujours débordants d’eau savonneuse. Au bout, du côté de la rue de la Goutte-d’Or, en descendant : à droite, boutique noires, cordonniers, tonneliers ; à gauche, merceries, épiceries borgnes” note notamment Zola dans ses dossiers préparatoires. Avec ses longues descriptions réalistes, il dépeint la vie quotidienne du quartier sous le Second Empire : les lavoirs et les blanchisseries, les boutiques, le travail ou encore les bistrots fétides où les ouvriers tentent d’oublier leurs malheurs. Dans ce roman mettant en scène Gervaise et ses fils Claude et Etienne, Emile Zola livre un précieux témoignage pour comprendre les évolutions de son époque.
Situé dans l’actuel XVIIIème arrondissement, le quartier de la Goutte-d’Or n’a fait partie de Paris qu’en 1859, appartenant auparavant à la commune de La Chapelle. L’industrialisation et l’apparition des “hôtels meublés” ont fait du quartier un endroit privilégié pour les immigrés arrivant à la capitale, venant d’Espagne, de Belgique, de Pologne ou d’Afrique du Nord à partir des années 1950.
La Goutte-d’Or, le roi des vins
Avant que les maisons et immeubles ne viennent former le quartier sur ce terrain pentu, la Goutte-d’Or était un vignoble dont le nom rappelle la couleur du vin. On trouve d’ailleurs la trace de cette appellation dès le Moyen-Age ! Une légende raconte que sous le règne de Saint-Louis, un jury attribua au cours d’une fête différents prix aux vins qu’il dégustait. Le premier a été décerné au vin de Chypre, dit “le pape des vins” et le second au vin de Malaga “le cardinal des vins”. En troisième position, ce jury improvisé mit à égalité celui de Malvoisie, d’Alicante et… celui de la Goutte-d’Or ! Ce dernier “roi des vins” devait alors être offert à Saint Louis chaque année par quatre muids, soit quatre fois 268 litres ! Avec le temps, ces vignes et leur précieux breuvage ont malheureusement disparus, pour laisser place au quartier très animé que l’on connaît aujourd’hui.
Crédit photo de Une : paris.fr – Roger-Viollet
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