Qu’elles soient majestueuses par leur architecture, riches d’une histoire étoffée ou simplement agréables à regarder, les églises font partie de ces monuments qui enrichissent le (déjà) riche patrimoine de Paris. Et celles-ci valent encore plus quand elles sortent de l’ordinaire, comme cette fascinante curiosité cachée dans le 15ème arrondissement de la capitale…
Une église révolutionnaire par sa construction
C’est au 28 rue de la Convention que se trouve l’église Saint-Christophe de Javel, l’un des édifices religieux les plus étonnants de la capitale. Une chapelle en bois, construite à cet emplacement en 1864 et dénommée “chapelle Saint-Alexandre”, fut détruite en 1890 avant d’être remplacée par une chapelle provisoire puis l’église que nous pouvons admirer aujourd’hui. Celle-ci est née de l’esprit de l’architecte Charles-Henri Besnard, connu comme le père du procédé de construction rapide aujourd’hui appelé “préfabriqué”. L’église a donc été mise au point grâce à ce procédé passant par l’emploi de matériaux en ciment armé préalablement préparés en série, moulés à l’autre bout de la France puis montés à Paris par blocs. De ce fait, Saint-Christophe de Javel est donc considérée comme la première église préfabriquée de France. “Elle est constituée au moyen d’éléments de construction en ciment armé, fabriqués à pied d’œuvre et sortant en série de grands moules exécutés avec la plus grande précision. Ces éléments ont été montés jusqu’à la place qu’ils devaient occuper dans la construction, puis assemblés avec les éléments voisins. C’est là une application d’une technique toute nouvelle du ciment armé à laquelle l’église Saint Christophe de Javel doit son caractère très spécial” dira notamment l’architecte Charles-Henri Besnard en 1930. Étonnante et impressionnante depuis l’extérieur, l’église du 15ème arrondissement fascine également une fois à l’intérieur, alors qu’une question se pose : pourquoi se nomme-t-elle Saint-Christophe ?
Un assemblage d’œuvres d’art à l’intérieur
Initialement racontée par un dominicain génois du XIIIe siècle du nom de Jacques de Voragine, la légende de Saint Christophe est au cœur de la La Légende Dorée, un assemblage de ses récits dont se sont inspirés les artistes de Saint-Christophe de Javel pour décorer l’église. Les peintures sur toile de Jacques Martin-Ferrières et les fresques d’Henri-Marcel Magne fournissent un résumé suggestif : Christophe cherche qui servir et la voie qui lui est proposée est de se mettre au service des autres pour rencontrer le Christ. Après sa conversion, il annonce l’Evangile malgré les persécutions, et va même jusqu’à guérir son persécuteur. La légende met en évidence la proximité de la vie du Saint avec celle du Christ, son modèle. Enfin, le fronton de l’église, en brique et béton, est orné d’une grande statue du saint, réalisée par Pierre Vigoureux. Aujourd’hui, le quartier de Javel est un quartier nouveau en extension après la disparition des principales industries lourdes et l’apparition d’autres types d’activités. De son passé le quartier garde des traces vivantes, comme la rue commerçante Saint Charles, les ensembles de logements sociaux, les bâtiments de l’hôpital Boucicaut, l’Imprimerie Nationale et bien évidemment cette église à jamais dans l’histoire de la capitale.
Un monument emblématique d’un quartier en perpétuelle évolution
Saint-Christophe étant le patron des voyageurs, l’église lui rend hommage à plusieurs reprises. À commencer par la peinture murale du chœur, signée d’Henri-Marcel Magne, qui le représente entouré de voyageurs implorant sa protection. Plus étonnant, on y aperçoit également des moyens de locomotion modernes tels que le train, le paquebot, le ballon, l’avion ou encore l’automobile, en référence aux industries de transport du quartier comme les usines Citroën toutes proches. Jusqu’en 1778, la plaine de Grenelle, comme celle de Vaugirard, était inhabitée, ce qui explique l’installation des premières manufactures. C’est là, un peu en aval, dans une usine de produits chimiques fondée par le comte d’Artois, frère de Louis XVI, que Claude-Louis Berthollet produisait un désinfectant à base d’hypochlorite de sodium ou sel de potasse, connu depuis sous le nom d’eau de Javel. Dès lors, le quartier allait foisonner de blanchisseries. Viennent ensuite les usines à gaz, blanchisseries, briqueteries et autres boyauderies, avant l’essor du chemin de fer, de l’automobile, puis de l’aviation, entraînant à chaque fois l’implantation de sociétés et d’usines. Un quartier qui, comme Paris, n’a donc eu de cesse de se transformer et d’évoluer, et qui est ainsi célébré dans ce monument religieux qu’est Saint-Christophe de Javel. Réalisées par Henri-Marcel Magne, l’un des décorateurs du Sacré-Coeur de Paris, ces fresques sur la peinture murale sont également un rappel que, grâce aux tons bleutés et dorés, l’église a été érigée en pleine époque Art Déco.
Église Saint-Christophe de Javel
28 rue de la Convention
75015 Paris
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Image à la une : Eglise Saint-Christophe de Javel © Alamy