
Paris est toujours pleine de surprises et cache encore des petites histoires et détails étonnants ! C’est le cas notamment du Pont du Carrousel, et plus particulièrement de ses lampadaires. Si, au premier abord, ils semblent tout à fait normaux, ils cachent un secret : ils sont télescopiques et changent de hauteur ! Paris ZigZag vous dévoile cette création bluffante qui n’a pas été une mince affaire !
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Un challenge d’architecture et d’ingénierie
Construit entre 1935 et 1939 dans l’axe des guichets du Louvre, le pont du Carrousel est l’oeuvre commune des ingénieurs Henri Lang et Jacques Morane et de l’architecte Gustave Umbdenstock. Les lampadaires qui bordent les extrémités de l’édifice sont, quant à eux, le fruit du travail de Raymond Subes, célèbre artiste-décorateur et ferronnier d’art des années 30.
Au moment de passer commande au ferronnier, le service des Ponts de Paris lui impose d’emblée deux exigences : les lampadaires ne doivent pas être trop modernes pour s’insérer dans l’architecture classique du quartier et ne doivent pas être plus grand que 13 mètres pour ne pas dépasser la toiture du Palais du Louvre situé à côté. Des conditions difficiles à satisfaire quand on sait que, dans le même temps, les réverbères doivent mesurer au moins 20 mètres pour ne pas éblouir les passants et automobilistes et illuminer la totalité du pont !
Mais Raymond Subes n’est pas du genre à se laisser arrêter par des détails techniques… Puisqu’on lui impose deux hauteurs différentes, il décide de créer des lampadaires dotés d’obélisques télescopiques qui coulissent : le jour, les lampadaires éteints se dresseront à 13 mètres de haut, la nuit, ils pourront s’élever jusqu’à 22 mètres.
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Une construction stoppée
Alors que le ferronnier travaille depuis presque trois ans sur son dispositif, l’entrée en guerre de la France contre l’Allemagne le 3 septembre 1939 interrompt brutalement ses travaux. C’est dans une France occupée par les allemands et dans le plus grand secret que l’artiste-ferronnier reprendra, un an plus tard, l’élaboration de ses réverbères.
Mais Raymond Subes n’est pas au bout de ses peines ! Ses quatre lampadaires terminés, il doit les dissimuler dans les évidements de culées du pont pour ne pas à avoir à les donner aux allemands qui récupèrent tous les stocks de cuivre pour l’industrie et l’armement. Les quatre immenses pylônes, constitués de 20 tonnes de cuivre et 40 tonnes d’acier, y resteront cachés jusqu’à la fin de la Seconde guerre mondiale.
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Quand, au sortir de la guerre, l’artiste-ferronnier peut enfin installer les lampadaires télescopiques, il doit d’abord les faire rénover – ils ont pris l’eau dans leur cachette souterraine, puis il fait face à un ultime problème : les lampadaires ont fonctionné comme prévu en montant et en descendant… une seule fois ! Mal conçu, l’appareillage serait tombé en panne dès sa première utilisation pour certains, au bout de quelques années pour d’autres. Une chose est sûre, Raymond Subes ne verra plus jamais son dispositif fonctionner : la ville de Paris ne les fera restaurer que 50 ans plus tard, en 1999, dans le cadre des illuminations liées au passage à l’an 2000.