Se balader, ne serait-ce qu’une heure, dans un cadre de verdure est une activité des plus simples, mais ô combien satisfaisante. Le plaisir est encore plus grand quand le cadre en question est d’une incroyable beauté, digne d’un tableau d’un grand maître. Des parcs au cadre enchanteur, il en existe plusieurs à Paris, comme celui des Buttes-Chaumont ou Monceau. Mais la capitale est loin d’être la seule à disposer de tels espaces verts appréciés des petits comme des grands. Heureusement, il ne faut pas aller bien loin pour en découvrir l’un des plus charmants…
Une bataille d’égo pour savoir qui aura le plus beau domaine
Limitrophe de Paris, Neuilly-sur-Seine peut se vanter d’accueillir plusieurs monuments historiques comme l’église paroissiale Saint-Jean-Baptiste, l’aile nord du château de Neuilly (détruit en 1848) ou encore l’hôtel de ville construit à la fin du XIXe siècle. Mais l’une des plus belles propriétés de la ville n’est pas un monument, mais un parc : celui de la Folie Saint-James, une demeure ayant appartenu à Claude Baudard de Vaudésir de Sainte-James, baron de Sainte-Gemmes-sur-Loire et contrôleur général de la Marine de Louis XV. Un domaine qui faisait anciennement partie du château de Madrid, résidence royale bâtie dans le bois de Boulogne mais entièrement démolie à la fin du XVIIIe siècle. C’est lui qui fit construire et aménager en 1777 par François-Joseph Bélanger, premier architecte du comte d’Artois et l’un des plus grands paysagistes de son époque, une maison et un domaine, luxueusement décoré de fabriques et planté d’arbres recherchés, que l’on appelait “folie”. La demande de Saint-James à l’architecte fut limpide : “Faites ce que vous voulez pourvu que ce soit cher.” Pour le propriétaire, il ne s’agit ni plus ni moins que de rivaliser avec la Folie du comte d’Artois, futur Charles X, qui se trouve être aujourd’hui le parc de Bagatelle.
Un superbe espace vert qui était autrefois bien plus grand
Le réputé François Joseph Bélanger conçoit le parc sur le modèle des jardins pittoresques et anglo-chinois du 18e siècle en France, tels le Petit Trianon à Versailles, Bagatelle ou le parc Monceau à Paris. D’une superficie de 12 hectares, le parc s’étend des deux côtés de l’avenue de Longchamp et les parties communiquent par deux souterrains. Un canal sinueux le traverse, agrémenté de multiples ponts, de grottes et autres fabriques. Le domaine comporte même une extension vers la Seine dont l’eau, via une “pompe à feu”, alimentait le canal. Propriété de l’État depuis 1952, le parc de la Folie Saint-James ne s’étend plus que sur 1,8 hectare, mais garde fort heureusement les traces d’une œuvre majeure de l’art paysager français des années 1770 à 1790. On peut bien entendu commencer par découvrir le pavillon, ce bâtiment de style classique qui a su conserver des éléments d’origine comme les pavés de la cour d’honneur, la rampe en fer forgé de l’escalier ou encore les magnifiques trompe-l’œil du vestibule. Malgré de nombreuses pertes au fil du temps, certaines fabriques notoires ont survécu au sein du parc. On peut ainsi admirer le “grand pont de pierres de taille”, seul reliquat du canal, la “colonne antique” et les deux vases en pierre qui ornaient l’un des ponts. Il existe également un cabinet d’histoire naturelle de la Folie, qui demeure inaccessible au public.
Un parc qui a coûté une somme affolante pour l’époque
L’une des pièces maîtresse du parc est sans conteste le “Grand Rocher”, un imposant empilement de blocs de grès, rapportés de la forêt de Fontainebleau. Cette fabrique aurait coûté à elle seule 1 600 000 livres. Voyant un jour passer le convoi de blocs de pierre tiré par une quarantaine de chevaux, Louis XVI aurait immédiatement appelé Sainte-James “l’homme au rocher”. Preuve que la démesure permet de laisser son nom dans l’Histoire. Le Grand Rocher est pensé pour abriter thermes et réserve d’eau destinée à alimenter les bassins. Au centre, un temple composé de six colonnes se dresse. On pénètre alors dans “l’Antre primordiale”, une grotte obscure, puis dans le « Salon des bains », réplique des thermes de Caracalla. Au cœur d’une compétition des plus luxueuses, délabré, restauré dans le style Art Déco et même endommagé entre 1944 et 1947 en étant occupé par les Allemands puis les Américains, l’histoire du Parc de la Folie Saint-James n’est pas aussi reposante que l’atmosphère qui se dégage de cet écrin de verdure. Toutefois, en 1899, le célèbre peintre Henri de Toulouse-Lautrec séjourna à la Folie Saint-James. À cette époque, le domaine avait été reconverti en une maison de santé par le Dr Casimir Pinel, un spécialiste des maladies nerveuses et le neveu de Philippe Pinel, l’un des pionniers de la psychiatrie moderne. Un séjour qui ajoute en plus une touche de notoriété artistique à l’histoire déjà riche de la propriété.
Parc de la Folie Saint-James
34 avenue de Madrid
92200 Neuilly-sur-Seine
À lire également : Un plan d’envergure prévoit la création d’un “parc urbain” de 27 hectares dans le nord de Paris !
Image à la une : Parc de la Folie Saint-James © CD92 / Julia Brechler