Profiter d’un peu de verdure dans le 16ème arrondissement, c’est bien souvent se rendre au bois de Boulogne, où les 846 hectares de terrain sont à la fois un lieu de promenade idéal et un réservoir biologique de renom pour la capitale. Mais opter pour le bois de Boulogne, c’est aussi oublier ces quelques squares et espaces verts méconnus du même arrondissement, comme ce fascinant parc dont l’origine remonte tout de même à plusieurs siècles en arrière…
De résidence champêtre à terrain de jeu pour les enfants
De 1109 jusqu’à la Révolution, le parc fait partie d’un domaine relevant de l’abbaye Sainte-Geneviève, servant de résidence champêtre pour les moines et sur lequel on cultive la vigne. Une propriété alors délimitée par la Seine et les actuels boulevard Exelmans et rues Boileau, d’Auteuil et Wilhem. Situé en dehors des anciennes frontières de Paris, le domaine est toutefois vendu comme tant d’autres monuments en tant que bien national lors de la Révolution. À la suite du démantèlement du site, d’abord livré aux vaches et aux chevaux, plusieurs propriétaires s’enchaînent avant que le domaine ne soit morcelé et considérablement réduit. Ce n’est que dans les années 1850 que l’on s’intéresse de nouveau à cet espace, quasiment laissé à l’abandon. L’institution hospitalière Sainte-Périne, établie dans le village de Chaillot, réaménage le domaine, tout en faisant construire de nouveaux bâtiments pour cette œuvre charitable qui accueille à l’origine une maison de retraite. II en ressort également un magnifique parc, propice au calme et au repos des hospitalisés convalescents : le parc Sainte-Périne. Devenu espace vert classé, le parc est cédé gratuitement en 1977 à la mairie de Paris pour en faire un jardin destiné aux enfants du quartier. De 2 hectares lors de l’ouverture au public, le parc Sainte-Périne passe progressivement à 3,7 hectares, donnant lieu à un réaménagement de ses allées et à la plantation de nouveaux arbres.
Un poumon vert sauvé par les riverains… et la Ligue pour la protection des oiseaux
De quoi faire le bonheur des riverains, qui peuvent aisément profiter de ce formidable espace vert tout au long de l’année. De plus, le parc Sainte-Périne se révèle être un cadre idéal pour quelques fêtes et événements, comme en 2021, lorsque la mairie du 16e arrondissement crée une scène éphémère au sein du parc pour célébrer les 400 ans de la naissance de Jean de la Fontaine, avec au programme une quinzaine de spectacles gratuits. Ou à l’image de cet été lorsque, dans le cadre des Jeux olympiques, le parc a accueilli un site de festivités de proximité, avec retransmission des épreuves ou encore démonstrations sportives… Autant de moments qui ont bien failli ne pas voir le jour dans ce parc passé tout près de la disparition. En 2006, le maire de Paris Bertrand Delanoë tente de faire voter le déclassement de cet espace vert protégé, au motif qu’il s’agit d’un terrain libre et constructible, ce qui entraînerait l’abattage de plus d’une centaine de platanes, tilleuls et arbres exotiques. L’objectif est de construire sur près de 6 % de sa superficie un ensemble immobilier de 210 logements “à vocation sociale”, dont la moitié destinée au personnel de l’APHP. Mais le projet rencontre l’opposition massive des riverains, des écoles du quartier, du conseil d’arrondissement et de la Ligue pour la protection des oiseaux. Si l’entreprise de déclassement du parc est finalement mise en échec, le projet immobilier n’a jamais été stoppé. Fort heureusement pour les amoureux du parc Sainte-Périne, aucun chantier n’a finalement été engagé plus d’une décennie après…
Un réservoir biologique à arpenter encore et encore
Bien plus qu’un simple parc pour les enfants, cet espace vert historique de Paris est l’incarnation parfaite de la réserve naturelle aux mille et unes merveilles. Platanes, érables, frênes, tilleuls et marronniers, héritage de l’institution hospitalière, côtoient désormais plus de soixante-dix arbres d’essence exotiques. En venant se promener ou simplement se relaxer au parc Sainte-Périne, on peut ainsi que s’émerveiller devant un copalme d’Amérique à l’écorce sillonnée ou un arbre parasol de Chine au feuillage ample. Parmi les autres merveilles du lieu, on croise également un mûrier à papier et son feuillage aux teintes dorées en automne, un ginkgo biloba, un tulipier de Virginie, un ehrétia aux fleurs blanches d’une senteur exceptionnelle ou encore des pruniers aux belles floraisons printanières. Enfin, difficile de ne pas évoquer les plaqueminiers, dont deux variétés sont ici représentées : le Dyospiros kaki et le Dyospiros lotus. Le premier, à l’origine inconnue, produit des gros fruits juteux et rouges à l’automne, les kakis, tandis que le second, originaire du Sud-Ouest de l’Asie et du Nord de l’Iran, arbore des petits fruits jaune-brun puis bleu-noir à maturité, eux aussi comestibles. Si la partie centrale du parc est aménagée, ses zones latérales nord et sud gardent une végétation dense, telle une forêt luxuriante, afin de maintenir dans le quartier un véritable réservoir biologique. Aussi étonnant que cela puisse paraître, des espèces de chauve-souris y sont par exemple répertoriées. De quoi offrir un véritable dépaysement à quelques mètres seulement du périphérique et justifier l’importance de ce parc jadis menacé, aujourd’hui reconnu comme l’un des plus grands poumons verts du 16ème arrondissement, aux côtés du Bois de Boulogne et du jardin du Ranelagh.
Parc Sainte-Périne
39 rue Mirabeau
75116 Paris
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Image à la une : Parc Sainte-Périne © Wikimedia Commons /Mu