
Avec le retour des beaux jours et, surtout, des fortes chaleurs, la tentation est forcément grande : s’offrir une bonne baignade. Lorsque l’on vit à Paris, pas besoin de faire des kilomètres, grâce aux nombreuses piscines dispersées un peu partout dans la capitale. Surtout quand, au plaisir de se baigner, on peut ajouter celui de le faire dans un cadre de rêve.
Le trésor caché d’un immeuble révolutionnaire en son temps
L’histoire des lieux débute au tout début du XXe siècle, tandis que l’architecte et décorateur Henri Sauvage dirige depuis 1903, avec Charles Sarazin, la Société anonyme de logements hygiéniques à bon marché, qui se situe dans le mouvement hygiéniste. La Ville souhaitant construire une “habitation à bon marché” sur un terrain de la rue des Amiraux, dans le 18e arrondissement de Paris, ils déposent un projet en 1916. Souvent appelés HBM, ces habitations à bon marché correspondaient jusqu’en 1950 en France aux actuelles habitations à loyer modéré (HLM). La construction commence en 1922 et s’achève en 1927. Si Sauvage désirait installer un cinéma dans la cour centrale, la ville décide pourtant… d’y construire une piscine, qui est inaugurée en 1930. S’il faut attendre les années 80 pour que l’immeuble soit inscrit aux monuments historiques, cette construction des années 1920 demeure assurément une des plus intéressantes et abouties de l’architecte rouennais, puisqu’elle concentre les résultats de ses recherches concernant l’ensoleillement et l’aération de logements destinés à la classe ouvrière et commandés par l’Office d’Habitations Bon Marché. Un joyau de l’architecture parisienne qui se démarque, pas seulement pour son histoire ou son architecture, mais aussi pour l’étonnant trésor qu’il abrite : la piscine des Amiraux, qui compte parmi les plus anciennes de Paris.

La 1ère piscine de Paris à disposer d’un système de traitement de l’eau
Reconnue pour ses techniques ingénieuses, tout comme l’immeuble dans lequel elle se trouve, la piscine prend place au cœur de l’édifice pyramidal, mais elle bénéficie d’un éclairage zénithal par une verrière donnant sur la cour intérieure de l’immeuble, qui ventile l’air dans le volume central. Outre cette vision novatrice, ce qui rend également cette piscine si singulière sont sa structure innovante, alliance de poteaux et de poutres en béton armé, et son organisation spatiale puisque, depuis l’entrée jusqu’au bassin, le parcours hygiénique du visiteur passe par les bains douches. Par ailleurs, la piscine des Amiraux était un symbole complexité, notamment à travers son système de chauffage et de ventilation mécanique qui permettait à la fois d’assurer une température idéale de l’air et de l’eau, mais qui empêchait également la condensation, problème fréquent dans ce genre de programme. Ainsi, la piscine des Amiraux était la première piscine parisienne à disposer d’un système de traitement de l’eau. Autant de prouesses techniques qui se fondent à merveille dans un style Art Déco, reprenant le vocabulaire du paquebot : lignes courbes et incurvées, balustrades, hublots, coursives, etc. Il convient également de noter que la réalisation d’Henri Sauvage accorde une grande attention aux décors alliant béton et céramique émaillée, matériaux facilement nettoyables pour répondre aux préoccupations d’hygiène de l’époque.
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Assurément l’une des plus belles piscines de la capitale
Au fil des ans, ce joyau de l’Art Déco parisien est devenu vétuste, tandis que les différentes mises aux normes dans les années 1980 et 1990 ont de surcroît dénaturé son esthétique originelle. De quoi sensibiliser la Ville de Paris, qui a donc lancé un vaste chantier de rénovation de ce bâtiment classé aux Monuments historiques. Jamais oublié par les Parisiens et autres amoureux de natation, l’édifice avait même eu droit aux honneurs du 7ème Art, en étant un lieu de tournage pour une scène du film Le Fabuleux Destin d’Amélie Poulain. Le dernier coup d’éclat d’une piscine qui a alors fermé ses portes en 2015 pour laisser place à un chantier très complexe. Coût total de l’opération réalisée dans le cadre du plan Nager à Paris : 16,5 millions d’euros. Avec cette rénovation, les architectes ont tenu à restituer la piscine “au plus proche” de son aspect initial. La verrière au-dessus de l’eau est ainsi réapparue telle qu’en 1930, offrant une lumière naturelle zénithale. De même que la voûte du fond, constellée de petits hublots de verre épais, complètement obstrués. Autres éléments essentiels au charme du site : les portes des 164 cabines ont retrouvé leur couleur “vert tamier” d’antan, tandis que la faïence murale et celle du bassin renouent aussi avec le vert. Enfin, la pièce maîtresse de l’édifice, le bassin de 30 mètres sur 10 mètres, a lui aussi été démoli et reconstruit à l’identique, reprenant les détails de sa construction d’origine. Rouverte depuis 2017, la piscine des Amiraux fait à nouveau le bonheur des plus jeunes comme des plus grands, tous désireux de se rafraîchir dans l’un des plus beaux décors de la capitale.
Piscine des Amiraux
6 rue Hermann Lachapelle
75018 Paris
Horaires et tarifs à retrouver ici
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Image à la une : Piscine des Amiraux © Henri Garat / Mairie de Paris