Lieu de recueillement pour les proches, les cimetières font partie de ces sites qui fascinent, auxquels on associe des légendes inquiétantes ou des rumeurs totalement folles. Surtout, il s’agit d’endroits visuellement saisissants, qui attirent comme un aimant les curieux en quête de balades insolites. À l’image du mythique cimetière du Père-Lachaise, qui attire chaque année plus de 3 millions de visiteurs, ne serait-ce que pour voir les tombes d’illustres personnages tels que Molière ou La Fontaine. Et en parlant justement du Père-Lachaise, saviez-vous qu’il existe son pendant lyonnais ?
L’histoire de Loyasse est aussi celle des cimetières en France
C’est un fait qui ne date pas d’hier : la forte augmentation de la population provoque un trop-plein dans les cimetières, et il n’y pas d’autre choix que d’imaginer un cimetière plus grand dans une ville qui grandit elle aussi. C’est ce qu’a connu Paris au XIXe siècle avec l’apparition de trois cimetières majeurs (Père-Lachaise, Montparnasse et Montmartre), et c’est logiquement ce qui est arrivé à d’autres grandes villes de France qui se sont considérablement développées avec le temps, à commencer par Lyon. Dès la seconde moitié du XVIIIe siècle, l’augmentation de la population urbaine se révèle être un défi, notamment pour les cimetières charniers situés près des églises, qui sont vite pleins. Conséquence grave de ce trop-plein : les problèmes sanitaires qui en découlent et qui se font de plus en plus insupportables. Pour résoudre ces problèmes, une ordonnance royale de 1776 interdit les inhumations dans les églises et chapelles et recommande, sans l’imposer, d’éloigner les lieux de sépulture des habitations et d’en prévoir de nouveaux hors des murs de la ville. C’est finalement un autre décret impérial de 1804 qui va créer les premiers cimetières modernes : toutes les inhumations doivent désormais être individuelles, hors les murs et éloignées de 30 à 40 mètres de l’enceinte de la ville, de préférence sur un terrain en hauteur. Le principe de concession temporaire est également établi : la durée de ces concessions est de 5 ans et chaque bénéficiaire peut, s’il le souhaite, poser une pierre tombale sur la fosse d’un proche.
Un cimetière riche en curiosités et en particularités
Une véritable “révolution” qui se met rapidement en place à Lyon, où 3 cimetières vont voir le jour : à la Guillotière (1822), à la Croix-Rousse (1823) et à Loyasse, qui sera le premier à être édifié. Situé sur la colline de Fourvière, un emplacement idoine pour répondre aux contraintes hygiéniques, ce cimetière y est d’abord établi sous le nom de “Cimetière des 4 vents”. Les premières inhumations ont lieu dès 1808, soit quatre ans après la création du Père Lachaise à Paris, et le plus ancien tombeau conservé à Loyasse est celui d’un dénommé Philibert Jambon, datant de 1809. Imaginés par par Joseph Gay, alors architecte adjoint de la ville de Lyon, les plans du cimetière de Loyasse présentent un lieu de recueillement où les tombes sont alignées de façon symétrique autour d’un cercle central et où aucune fosse commune n’est prévue. Plusieurs extensions viennent ensuite agrandir le cimetière, comme le Carré des Prêtres. Grande particularité de Loyasse, cet espace réservé aux ecclésiastiques, encore géré par l’archevêché de nos jours, abrite des sépultures qui, selon la volonté des chanoines de l’époque, ne portent aucun signe distinctif. Seul un monument est élevé à la mémoire des donateurs, au centre du Carré. Autre particularité de ce cimetière lyonnais : contrairement à la plupart des cimetières français, la partie la plus ancienne se situe au fond du cimetière et non à l’entrée.
La tombe d’un guérisseur mystique continue de fasciner
Si le cimetière de la Guillotière est, par tradition, le cimetière des pauvres, le cimetière de Loyasse est réputé pour être celui des riches, notamment “à cause” du décret de 1804 qui instaure le principe de concession. Une inhumation simple à Loyasse sur un emplacement de 5 ans non renouvelable, coûtait 34 francs, une somme inaccessible à la plupart des gens. Source de revenus importante, les prix appliqués à Loyasse vont peu à peu devenir bien supérieurs aux autres cimetières lyonnais et une grande partie des concessions sont alors acquises par la bourgeoisie lyonnaise. Outre une population plus fortunée, le cimetière de Loyasse devient aussi le lieu de repos des personnalités, d’où la comparaison avec le Père-Lachaise. Hommes politiques, artistes, médecins ou architectes reposent en effet à Loyasse, à l’image des anciens maires de Lyon Edouard Herriot, Antoine Gailleton ou encore Gérard Collomb, mais aussi le maître verrier Lucien Bégule, dont on retrouve les vitraux à la Basilique de Fourvière. Le précurseur de la chirurgie orthopédique Amédée Bonnet et Jean Lacassagne, médecin et historien, représentent aussi ces scientifiques qui ont contribué, par leurs travaux, à l’avancée de leur discipline. Enfin, tout comme au Père-Lachaise, le cimetière lyonnais est le théâtre d’une étonnante coutume. Bien que décédé en 1905, la tombe de Nizier Anthelme Philippe, dit “Maître Philippe”, un thaumaturge célèbre à qui on aurait attribué un certain nombre de guérisons miraculeuses et connu pour ses talents dans les grandes cours européennes, reste encore aujourd’hui l’une des plus fleuries de Loyasse. Sans doute pour profiter, même par-delà la mort, des dons hors du commun de ce mystique guérisseur capable de “guérir les corps et les âmes”.
Cimetière de Loyasse
43 rue du Cardinal Gerlier
69005 Lyon
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Image à la une : Cimetière de Loyasse © Lyon Demain Médias