L’une des meilleures manières d’apprendre l’histoire de l’art et son évolution au fil des siècles reste de se rendre dans des musées où reposent les plus belles œuvres. Et il en va de même pour d’autres domaines, comme la médecine. Véritable cabinet de curiosités ou plongée fascinante dans les secrets du corps humain, il existe à travers la France plusieurs musées et conservatoires d’anatomie. Et l’un des plus étranges, et assurément déroutant, se trouve à Lyon…
Un véritable puits d’enseignement en attente de sa réouverture
C’est en 1854 que le musée Testut-Latarjet voit le jour à la demande du directeur de l’école préparatoire de médecine de Lyon. À ses débuts, tous ces trésors anatomiques légués par le chirurgien Marc-Antoine Petit se trouvent à l’Hôtel-Dieu. Fondateur du premier cabinet anatomique lyonnais en 1796 et considéré comme le père de l’enseignement médico-chirurgical, ce chirurgien avait rassemblé plusieurs milliers d’objets et d’ouvrages. Du temps où il exerçait, Marc-Antoine Petit avait déjà réclamé la création d’une bibliothèque et d’un espace où exposer ses collections. Un projet qui ne verra le jour qu’après sa mort… Au fil des ans, le musée ne cesse d’évoluer et fusionne même avec d’autres institutions médicales, comme lorsque la Société des sciences médicales fusionne avec la Société de médecine qui gère le musée et que les collections d’anatomie et instruments récoltés par les membres de cette institution viennent s’ajouter au fonds. Devenant petit à petit un lieu de formation essentiel pour les futurs médecins lyonnais, le musée connaît un déménagement en 1930, direction l’enceinte de la flambant neuve faculté de médecine sur le domaine Rockefeller dans le 8e arrondissement de Lyon. Une situation qui dure jusqu’à ce que les collections soient délogées par l’université Lyon 1 en 2015, dormant même jusqu’en 2021 dans un hangar sur un terrain militaire de Rillieux-la-Pape, avant de se voir réparties dans d’autres lieux de stockage à travers la métropole. Temporairement fermé depuis 2015, le musée Testut-Latarjet doit prochainement rouvrir ses portes à Rillieux-la-Pape, sans date précise pour le moment.
Des collections qui ont de quoi faire frissonner
De quoi se préparer avant la réouverture… car cela demande du courage de découvrir ce musée. On y retrouve le pire qui n’ait jamais été fait à l’anatomie humaine. Au programme : déformations crâniennes, squelette d’eunuque, foetus en bocaux, histoire des drogues ou encore célèbres affaires de crimes. Les collections du musée Testut-Latarjet, nommé ainsi en mémoire des anatomistes renommés Jean-Léo Testut et André Latarjet, se divisent en huit domaines principaux : anatomie comparée, anatomie générale, anthropologie criminelle, égyptologie et techniques de conservation, embryologie et tératologie (où l’on y trouve quelques monstruosités issues d’anomalies lors du développement tel un cyclope ou des siamois), ostéologie, paléoanthropologie et, enfin, parasitologie et maladies tropicales. Par ailleurs, le musée possède des collections ayant appartenu à des personnalités majeures dans l’histoire des sciences, à l’image de la collection Louis Léopold Ollier, Alexandre Lacassagne, Léo Testut ou encore Etienne Destot. Exposées dans des vitrines du XIXe siècle, les œuvres de ce musée illustrent donc chaque région anatomique, décrivant ainsi l’évolution des maladies et de leur traitement depuis la fin du XVIIIe siècle. Outre “l’exploration” du corps humain, on y trouve également 50 squelettes d’animaux terrestres et marins et 60 animaux naturalisés venant compléter cette riche et déroutante collection.
Un trésor qui a logiquement attiré les convoitises
Un véritable trésor, d’un point de vue scientifique pour les passionnés d’anatomie, mais aussi financier pour les plus machiavéliques. Il y a quelques années, un employé du musée des sciences médicales de Lyon en tant que serrurier avait défrayé la chronique en volant les livres anciens de l’établissement pour les revendre aux enchères sur Internet. Plusieurs ouvrages anciens, dont certains datant du XVIIe siècle, avaient en effet disparu des fonds, avant de réapparaître quelques mois plus tard sur un site d’enchères. Pour mettre fin à ces agissements et stopper le voleur, les enquêteurs s’étaient alors fait passer pour des collectionneurs d’art et avaient donné rendez-vous à l’employé. Sans se douter une seule seconde qu’il serait arrêté, ce dernier s’était bel et bien présenté au lieu convenu, menant ainsi à son arrestation. S’en est suivie la perquisition du domicile de son amie qui n’a fait que confirmer les doutes des enquêteurs : de nombreux ouvrages provenant du musée y ont été découverts, tandis que d’autres avaient déjà été vendus pour plus de 700 euros. Il faut dire que, entre les corps momifiés, coupes de cerveaux, squelette d’eunuque, peaux naturalisées, masques mortuaires de Joseph-Marie Jacquard ou même de la poudre de momie, ce sont tout simplement les plus grandes curiosités de l’histoire de l’Humanité qui se cachent à Lyon…
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Image à la une : Musée Testut Latarjet © Camille Rolin