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Camille Claudel, une artiste torturée au talent exceptionnel

Par Lisa B

L’histoire de Camille Claudel est celle d’une femme talentueuse, au caractère de feu et au destin tragique. Sculptrice du mouvement expressionniste, elle œuvre toute sa vie pour s’émanciper, sans jamais parvenir à quitter l’ombre de son maître et amant, Auguste Rodin

La naissance d’une artiste de talent 

Camille Claudel naît en 1864, dans le département de l’Aisne, dans une famille de la petite bourgeoisie. Dès ses plus jeunes années, elle malaxe la terre et lui donne forme, sans jamais avoir pris de cours de modelage. Impressionné par le travail de sa fille, Louis-Prosper Claudel fait appel au sculpteur Alfred Boucher. Ce dernier est à son tour ébloui par le travail de cette artiste en herbe de 12 ans et la prend sous son aile. 

Camille Claudel et Jessie Lipscomb au second plan, dans leur atelier. Photographie de William Elborne.

Sur les conseils de son nouveau mentor, Camille Claudel part vivre à la capitale, malgré les réticences de sa mère, pour étudier à l’académie mixte Colarossi. En 1882, Alfred Boucher part pour l’Italie, laissant son élève aux mains d’un autre monstre de la sculpture : Auguste Rodin. Croulant sous les commandes, il engage alors la jeune Camille comme praticienne pour travailler à l’ébauche de ses sculptures. Par un travail acharné, Camille Claudel rivalise de talent avec son maître, qui lui laisse de plus en plus de place dans son atelier et dans sa vie. Travail, idées et sentiments se mêlent dans une relation passionnelle et destructrice. Claudel et Rodin partagent tout, des modèles de sculpture à la couche. De vingt-quatre ans son aîné, Auguste Rodin entretient déjà une relation avec Rose Beuret et ne consent jamais à s’engager avec sa maîtresse. 

Les drames de sa vie 

L’histoire retiendra pendant longtemps les rôles réducteurs de modèle et d’amante joués par Camille. De son vivant déjà, elle est critiquée pour son travail, trop ressemblant à celui de son maître. Lasse, elle s’installe dans son propre atelier en 1888 où elle vit recluse. Sa spécialité ? Sculpter des nus. Etre une femme artiste n’était déjà pas chose facile à l’époque, mais faire du nu… encore moins ! Elle représente avec sensibilité et sensualité des corps de femmes ou d’hommes, parfois enlacés comme pour La Valse. Malgré son profond désir d’indépendance, Camille Claudel est meurtrie par sa relation contrariée avec Rodin et par l’éloignement de son frère à l’étranger, dont elle est très proche. De son désespoir et de sa colère naissent de nombreux chefs d’œuvres comme L’Âge Mûr, allégorie de sa déchirante séparation avec son amant. 

L’Age mûr, 1899, Bronze, Camille Claudel

Malgré son talent, Camille Claudel peine à voler de ses propres ailes. L’argent vient à manquer, les commandes s’annulent mystérieusement… Elle en est persuadée, Rodin cherche à lui nuire. L’artiste tombe dans la paranoïa, détruisant beaucoup de ses œuvres dans ses excès de colère. Elle parvient néanmoins à être exposée dans plusieurs Salons des artistes français. Son ami Eugène Blot lui consacre même une exposition dans sa galerie en 1905. Toutefois, ses réactions violentes choquent son entourage et ses amis, qui finissent par s’éloigner d’elle. 

Et sa tourmente ne fait que commencer. En 1913, son père décède, sans qu’elle en soit avertie. Sa mère, farouchement opposée à son train de vie, en profite pour se débarrasser de cette fille trop fougueuse et la fait interner pour folie. Un internement qui sonne le glas de sa carrière artistique. Camille Claudel passe trente années en asile sans jamais plus créer, et ne reçoit des visites de son frère qu’une dizaine de fois. Toutes ses demandes de sorties lui sont refusées. Elle décède dans l’indifférence générale en 1943. Il aura fallu attendre 2017 pour qu’un premier musée sur sa vie et son œuvre voie le jour à Nogent-sur-Seine, dans l’Aube. Une salle lui est également consacrée au musée Rodin, à Paris

Photo : César, Portrait de Camille Claudel, vers 1884, © Musée Rodin

Lisa Back

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