fbpx

Henri IV a t-il perdu la tête ?

la tête supposée d'Henri IV en face du brocanteur qu'il la toujours revendiqué
Par Jérémy

Voilà un débat qui anime les chercheurs et les historiens depuis quelques années. A l’origine des spéculations, une histoire vieille de plusieurs siècles. En 1793, les révolutionnaires profanent des tombes à l’intérieur de la basilique Saint-Denis. Le cadavre du roi Henri IV est sorti de son cercueil, exposé à la foule pendant deux jours, puis jeté dans une fosse commune.

Aucun témoignage ni écrit ne relate une décapitation sur le cadavre du roi. Les ossements sont extirpés de cette fosse commune et ne sont ramenés dans la basilique par Louis XVIII qu’en 1817. Aucun des corps n’est identifiable et trois corps n’ont que les membres inférieurs enfouis dans la fosse, ce qui laisse supposer alors que les têtes sont autre part…

Ouverture du cercueil d'Henri IV à la basilique Saint-Denis en 1793
Ouverture du cercueil d’Henri IV à la basilique Saint-Denis en 1793

Trois crânes, dont un précisément, vont refaire parler d’eux 100 ans plus tard. Nous sommes alors le 31 octobre 1919 lors de la dispersion de l’hôtel Drouot. Des objets de l’atelier d’une peintre sont mis en vente lorsqu’un brocanteur achète trois crânes momifiés pour la modique somme de 3 francs… S’agit-il des trois têtes manquantes ? Joseph-Émile Bourdais le brocanteur en est persuadé (photo de une). 5 ans plus tard, l’un des trois crânes réapparaît dans un journal spécialisé dans l’art, la Gazette des arts. Stupéfaction pour les historiens : ce crâne serait celui d’Henri IV.

En effet, après plusieurs examens comprenant des moulages et des radiographies, Joseph-Émile Bourdais le brocanteur conclut qu’il s’agit de la tête momifiée d’Henri IV. Malgré le scepticisme général, il passera sa vie à tenter de prouver qu’il s’agit de la tête du roi qui fut assassiné par Ravaillac.
En 2009, la tête refait surface grâce à Stéphane Gabet et Pierre Belet, deux journalistes soucieux d’éclaircir le mystère près de 400 ans après la mort d’Henri IV. Ils retrouvent le propriétaire actuel de la tête momifiée et réalisent un documentaire sur cette mystérieuse tête.

Thèse validée

En 2010, un article publié par le très sérieux British Medical Journal relate les examens d’un groupe de 19 scientifiques dirigés par Philippe Charlier. Ils réalisent notamment une datation au carbone 14 qui prouve bien que l’individu au crané momifié a vécu entre 1450 et 1650 et que la tête a été séparée du corps des années après sa mort. Ce qui vient corroborer l’hypothèse que le défunt roi aurait perdu sa tête au moment de son exhumation lors de la Révolution. Le groupe de scientifiques va plus loin en faisant correspondre l’anatomie à celle d’Henri IV. Ils reconnaissent ainsi les stigmates de la vie du roi à travers son crâne. Comme la lésion osseuse à la bouche, triste souvenir d’une tentative d’assassinat par Jean Châtel. Mais c’est aussi la couleur des cheveux ou encore celle de la barbe qui sont mis en corrélation.

La supposée tête momifiée d'Henri IV
La supposée tête momifiée d’Henri IV

Éléments de contestation

L’une des premières contestations faites par les scientifiques qui réfutent cette hypothèse est l’absence de craniectomie. La tête aurait subi une momification sans qu’on lui retire le cerveau et avec la présence de noir animal (matière riche en carbone fait d’os calcinés qu’on utilisait chez les momifiés pour protéger leurs corps). Cette technique aurait été demandée par Marie de Médicis afin d’éviter la putréfaction du corps. Cependant aucun écrit officiel ne vient confirmer cette thèse. De plus à l’époque, aucun test ADN n’a pu être réalisé car le crâne fut contaminé au plomb à cause de son cercueil.

Qu’en est-il aujourd’hui ?

Un morceau d’ADN a finalement pu être prélevé dans le fond de la gorge de la tête momifiée. Il a ensuite été analysé puis comparé à un ADN prélevé sur un mouchoir trempé dans l’effusion de sang suivant la décapitation de Louis XVI. Philippe Charlier, toujours à la tête des investigations scientifiques, trouve un profil génétique commun, ce qui ferait de Louis XVI un descendant direct de l’homme à la tête momifiée.

Cependant, il ne s’agit pas là du fin mot de l’histoire : une autre équipe de scientifiques réfute cette hypothèse. Selon eux, et l’historien Phillipe Delorme, les empreintes génétiques prélevées ne s’appuient que sur des parties d’ADN incomplètes. Ils vont même plus loin en comparant cet échantillon avec les descendants de la Maison d’Orléans (descendants de la lignée royale de Bourbon). Ces derniers tests révèlent qu’un très faible taux de paternité unissait cette tête et les descendants encore vivants.

La controverse reste donc entière sur l’hypothétique tête d’Henri IV. Les années à venir et les progrès faits par les scientifiques sur l’ADN permettront peut-être un jour de résoudre ce mystère.