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Petite histoire de l’église Saint-Joseph des Nations, restaurée après un chantier pharaonique

Par Colombe

Cette église du 11e arrondissement renferme une histoire singulière méconnue des Parisiens. Donnant sur la très ancienne rue Saint Maur, elle n’a été construite qu’à la fin du XIXe siècle par l’architecte de l’Hôtel de Ville de Paris, Théodore Ballu, et fait actuellement l’objet d’une restauration impressionnante !

Une église rassemblant les nations du monde entier

Au XIXe siècle, face à la métamorphose du Faubourg du Temple, le clergé souhaite offrir à la population du quartier une nouvelle paroisse. La zone connait à cette époque une hausse significative du nombre d’habitants en raison, notamment, de l’implantation en masse de populations parisiennes pauvres, mais aussi de provinciaux et d’étrangers, évincés du centre de Paris par les travaux haussmanniens. La construction de la paroisse Saint-Joseph, décidée en 1852, débute en 1866 pour s’achever en 1875.

Dès son inauguration, la paroisse a eu comme fonction particulière le rassemblement de diverses populations et l’unité dans l’adversité ; pour rappeler cette volonté d’accueil, l’église prend le nom de « Saint-Joseph des Nations ». Aujourd’hui, elle abrite principalement une communauté portugaise et tamoule du Sri-Lanka.

Affrontements et pillage de l’église Saint-Joseph

L’église Saint-Joseph des Nations, bien que relativement récente par rapport à d’autres églises de la capitale, a aussi été le témoin de l’Histoire à plusieurs reprises et parfois même sa victime. Le 20 août 1899, cette église-ilot – c’est-à-dire exclusivement entourée de rues – est incendiée et saccagée dans le cadre d’affrontements entre dreyfusards et antidreyfusards.

Non loin de là, dans un immeuble de la rue de Chabrol, sont alors retranchés le directeur de l’hebdomadaire « L’antijuif » Jules Guérin et une dizaine de ses partisans antisémites. Le quartier est en ébullition depuis déjà plusieurs jours quand des affrontements violents entre antisémites et révolutionnaires éclatent devant l’immeuble. Les forces de l’ordre repoussent alors les manifestants vers la rue Saint-Maur où se trouve l’église… Il ne faut pas longtemps pour que l’église soit prise à partie et pillée.

Le Petit Journal illustré, numéro du 3 septembre 1899

Un trésor architectural en rénovation

L’église Saint-Joseph des Nations est une œuvre architecturale de style roman, en pierres de taille, mais qui emprunte quelques détails à la Renaissance. L’ampleur de son intérieur laisse le visiteur bouche bée, tout comme son porche à trois entrées. En janvier 2019, la maire de Paris et son adjointe au Patrimoine Karen Taieb ont chargé Elsa Ricaud du chantier de rénovation de l’église, estimé à 2,8 millions d’euros.

© Yannick Boschat

Le coq et la croix qui ornent l’église ont été les premiers à être rénovés. La croix avait été descendue dès 2009 pour des raisons de sécurité et entreposée dans l’église. Tous les deux ont été décapés, restaurés, puis préparés et redorés ; ils ont fait l’objet d’une opération de remontage spectaculaire à la fin du mois de janvier. Une grue a d’abord porté la croix en fer forgé de 350 kilos, puis le coq, devant le regard ébahis des passants.

© Yannick Boschat

Au sommet du clocher de deux étages trône une pyramide de pierre, formant une flèche à 60 mètres de haut. Cette dernière, déjà reconstruite en 1923, a été rebâtie dans le cadre de ce projet. Elsa Ricaud explique que « toutes les pierres étaient jointes entre elles par des agrafes en fer qui, en rouillant au fil des ans, ont pris plus de volume et fait éclater la pierre ». Ainsi, ce sont 180 tonnes de pierres qui ont été montées une par une au sommet pour reconstituer la flèche.

©Yannick Boschat

Le chantier, qui touchera à sa fin en juillet 2021, entame maintenant la phase de rénovation du beffroi et de la structure en bois qui porte les cloches et celle de révision du mécanisme de ces dernières. À propos de l’élévation de la croix et du coq, le maire du 11e arrondissement s’est déclaré enchanté  « d’accompagner vers le ciel cette croix qui marque le caractère culturel du lieu et ce coq gaulois et républicain ! ». Une belle illustration du caractère rassembleur de l’église Saint-Joseph des Nations, encore aujourd’hui.

© Yannick Boschat

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