fbpx

Quand l’église Saint-Gervais était bombardée un Vendredi Saint

Par Colombe

La Première Guerre mondiale a entrainé la mort de plus d’1,5 millions de Français, bilan sans doute sous-estimé et qui ne prend guère en compte les amputés, blessés à vie et disparus. Parmi ces épisodes meurtriers, le bombardement de l’église Saint-Gervais, dans le Marais, est considéré comme l’attaque parisienne la plus meurtrière.

Un bombardement le Vendredi Saint, quand l’église était bondée

Le week-end pascale débute et, en ce vendredi saint du 29 mars 1918, les fidèles du centre de Paris se rendent à l’église Saint-Gervais, église gothique du XVe siècle classée monument historique depuis 1862. Si en cette dernière année de Première guerre mondiale les rassemblements sont limités, ce jour-là, les Parisiens se rassemblent en nombre : on n’imagine pas que les Allemands puissent attaquer une église en ce jour si symbolique pour la religion catholique. Et pourtant. Aux alentours de 15h30, ce sont deux obus qui frappent tour à tour Montrouge et Châtillon. Une heure plus tard, l’église Saint-Gervais, située derrière l’Hôtel de Ville, est touchée à l’aveuglette en son point central. Les fidèles sont ensevelis sous les pierres centenaires de l’édifice. Le bilan, très lourd, fait état de 91 morts et 68 blessés.

©CollectionParticulière

L’éboulement creuse un trou si profond que les sépultures sont découvertes… Immédiatement, l’épisode retentit bien au-delà de la capitale, en France et à l’étranger. La presse nationale et internationale s’empare du sujet qui choque par sa cruauté. Le 31 mars 1918, en première page, le quotidien breton L’Ouest-Éclair titre, vaillant, « Un obus dans une église, L’ennemi ne vaincra pas ». Dans l’hémicycle, le député Grousseau déclare en séance avoir vu « avec une extrême douleur, le barbare ennemi bombarder une église ». « J’estime que dans les circonstances actuelles, il faut crier que la justice et le droit auront le dernier mot », poursuivra-t-il quand, dans le même temps, un communiqué officiel déclare ce bombardement comme « le plus meurtrier de la guerre ! ». Le bombardement illustrera d’ailleurs longtemps une guerre dont les civils ne sont pas épargnés.

L’année 1918, la plus meurtrière pour Paris

Pour les Allemands, cette attaque est le fruit d’un long travail : depuis plusieurs années, l’objectif des officiers allemands étaient la mise au point de pièces d’artillerie permettant le tir d’obus sur de grandes distances pour atteindre, justement, des villes comme Paris. Jusqu’alors, les lancers ne pouvaient atteindre que 40 kilomètres au maximum. La capitale, qu’il était impossible d’envahir par voie terrestre ou maritime, était ainsi intouchable. Jusqu’au 23 mars 1918, où les premiers coups sont tirés avec trois canons géants depuis la forêt de Saint-Gobain, à une petite centaine de kilomètres au nord de la ville. Cette ultime offensive du printemps et de l’été 1918 entrainera une pluie d’obus sur Paris, désormais à portée de tir des Allemands. On estime qu’entre le 23 mars et le 9 août 1918, 367 obus sont lancés, tuant 256 Parisiens et faisant plus de 600 blessés. Aucun cependant ne fera autant de victimes que celui du Vendredi Saint.

Les traces encore visibles sur le pilier Ouest.

À lire également : Les stigmates encore visibles de la Première Guerre mondiale à Paris