Ce somptueux château dont l’histoire nous plonge jusqu’à la Préhistoire est connu comme “le château de la Belle au Bois dormant”

Château de la Roche Courbon © Adobe Stock

Située dans le département pittoresque qu’est la Charente-Maritime, la ville de Saint-Porchaire, qui doit son nom à un abbé ayant vécu au VIe siècle, n’est certainement pas la plus connue mais demeure une étape idéale pour qui veut se détendre et savourer les spécialités du pays. Et entre deux dégustations, il fait toujours bon découvrir des édifices qui sortent de l’ordinaire, comme le plus grand château de Charente-Maritime…

Une forteresse rugueuse transformée en demeure de rêve

Au XVe siècle, en plein Moyen Âge, Jehan II de Latour fait construire une forteresse composée de deux corps de logis, avec quatre puissantes tours et un donjon massif. Un édifice digne des forteresses médiévales imprenables, car construit en forme de triangle sur un éperon rocheux et naturellement défendu par le marais. Avant cela, seuls subsistaient l’enceinte d’un village gallo-romain, des tombes mérovingiennes et les restes de murs du XIe siècle, le tout formant un lieu connu sous le nom de Romette. Quant au nom du château justement, il faut attendre le début du XVIIe siècle pour que Jacques de Courbon libère totalement Romette d’une indivision de 113 ans et, qu’en accordant les vocables de La Roche et de Courbon, apparaisse finalement La Roche Courbon. Initialement gris et froid, le château connaît alors une transformation bienvenue grâce à Jean-Louis de Courbon, petit-fils de Jacques, comme le rappelle si bien le tableau du peintre hollandais Jan Hackaert. Somptueux jardins à la française qui précèdent ceux de Versailles, corps de logis tourné vers la lumière avec apparition de larges fenêtres et un toit muni d’ouvertures à la Mansart, élégant balcon, escalier à double palier pour accéder aux jardins… comme dans un conte de fées, la citrouille a laissé place à un magnifique carrosse. Mais que l’on ne s’y trompe pas, ce château emblématique de la Charente-Maritime n’a pas grand-chose à voir avec Cendrillon…

L’un des plus beaux châteaux de France sauvé de l’oubli

Après plusieurs propriétaires et une vente aux enchères au début du XIXe siècle, le château est oublié jusqu’à ce que l’écrivain Pierre Loti, en vacances chez sa sœur domiciliée à Saint-Porchaire, redécouvre ce site lors de ses balades. Tombé sous le charme de ce joyau à l’abandon et en ruines, l’écrivain sauve, grâce à sa notoriété et une campagne de presse, celui qu’il surnomme volontiers le “château de La Belle au bois dormant”. Un effort finalement payant, puisque le château retrouve un propriétaire et, surtout, son charme d’antan en même temps qu’il est enrichi d’une chapelle dédiée à saint Michel dans les combles et d’un théâtre ennobli par un escalier à balustres et une porte du XVIIe siècle. Malgré les épreuves que sont la Seconde Guerre mondiale, un incendie en 1990 ou la tempête Martin en 1999, le château se relève à chaque fois, pour le plus plaisir des visiteurs curieux de découvrir un site qui résume à merveille l’évolution du monde. Entièrement meublé, le château de la Roche-Courbon se découvre au fil d’une visite guidée à travers le salon du XVIIIe siècle, le salon Louis XIII, la cuisine et la chambre qui invitent au cœur de l’art de vivre des siècles passés. Autre point de passage obligatoire : le cabinet des peintures, une pièce couverte des murs au plafond de paysages, architectures, portraits et figures de la mythologie antique. Enfin, quel meilleure conclusion que de terminer la visite par une balade dans les jardins à la française, où attendent des parterres de gazon agrémentés de fleurs, de statues, d’eau, d’allées de tilleuls, de buis taillés et d’un verger de 150 pommiers et poiriers, avant le clou du spectacle : le belvédère offrant une vue panoramique sur le domaine.

La visite riche en merveilles d’une demeure encore habitée © Château de La Roche Courbon

Un voyage fascinant dans le temps

Mais si le château de la Roche Courbon est aussi fascinant, c’est aussi parce que le voyage dans le temps qu’il offre ne se limite pas seulement au Moyen Âge, à la Renaissance ou au XIXe siècle. Il faut dire que le site, situé sur les bords du Bruant et enchâssé entre deux falaises, a toujours su attirer l’Homme… et ce depuis très longtemps. Sous le château actuel se trouvent en effet des grottes dont le mobilier préhistorique montre qu’elles étaient habitées dès l’époque moustérienne, soit 120 000 ans av. J.-C., et jusqu’à l’époque magdalénienne (10 000 ans av. J.-C.). En d’autres endroits de la forêt qui entoure le château subsistent également une enceinte d’un village gallo-romain, des tombes mérovingiennes et, bien avant l’actuel logis, des restes de murs du XIe siècle. Ce qui explique pourquoi, en grimpant les marches du donjon, on découvre ainsi le musée de la Préhistoire. Tandis que le premier étage “salle Henry de Lestrange” propose une initiation à la Préhistoire depuis 2 millions d’années, de l’Homo habilis jusqu’à l’âge du bronze, et un film de 20 minutes permettant de découvrir le site préhistorique de la Roche Courbon, le second niveau, “salle Paul Chénereau / Jacques Badois” est consacré à la Préhistoire de la Charente-Maritime et de la commune de Saint-Porchaire ainsi qu’aux grottes du domaine. Puis, l’aventure en terres préhistoriques se poursuit dans la forêt jusqu’aux grottes préhistoriques autrefois habitées. Dans un décor authentique de la vallée glacière du Bruant, le parcours Prehistozen nous mène à la découverte de campements reconstitués d’Homo Erectus, de Néandertal et d’Homo Sapiens… pour une fascinante randonnée 50 000 ans en arrière !