Après Toutankhamon en 2019 ou Napoléon en 2021, la Grande Halle de la Villette semble s’inscrire peu à peu comme le lieu des expositions monumentales, dont le budget considérable et la scénographie exubérante pourraient aisément être rapprochés des blockbusters du cinéma. Cette fois-ci, c’est l’exposition Ramsès II et l’or des pharaons qui, lors de sa tournée mondiale, fait une escale à Paris du 7 avril au 4 septembre 2023. Elle rend ainsi hommage au pharaon qui a connu le règne le plus long de l’histoire égyptienne (67 ans) à travers 180 pièces originales, et le prêt exceptionnel de son cercueil emblématique à la France.
Un règne historique de 67 ans
Les Égyptiens pensaient que tout homme demeurait immortel si l’on continuait d’évoquer son nom à travers les siècles. Le souhait est en tout cas exaucé pour Ramsès II, qui est de nos jours l’un des pharaons les plus connus de l’histoire égyptienne.
Celui qui est surnommé « Ramsès le Grand » fait immédiatement songer aux Grandes Pyramides, aux splendides temples, aux multiples dieux et aux épopées historiques. Et pour cause : grâce à un long règne de 67 ans, le pharaon a joué un rôle important en Égypte, en contribuant à l’expansion et à la prospérité de son empire. Bien sûr, il a tout autant pris le soin d’inscrire son nom dans l’histoire par l’édification d’innombrables monuments à son honneur. Mort à 92 ans, Ramsès a toujours été associé à Amon-Rê, le dieu soleil, et vénéré comme une divinité par son peuple.
La chronologie de son règne est tout d’abord retracée dans la file d’attente de l’exposition. Nous arrivons au Nouvel Empire, au XIIIe siècle avant notre ère, et poursuivons le souvenir du pharaon au travers de la Troisième Période intermédiaire (1069-664 av. J.-C.) et de la Basse Époque (664-332 avant J.-C.). Dès le sas d’entrée, on fait face à un écran géant présentant le règne de Ramsès II et sa postérité. On pénètre ensuite dans l’exposition, conçue dans une scénographie grandiloquente, à l’instar d’un péplum : les lumières sont tamisées pour faire ressortir les pièces égyptiennes qui irradient sous les projecteurs, tandis que des effets visuels et sonores ponctuent la visite.
On découvre alors des objets remarquables honorant Ramsès II, comme la tête de statue colossale en granodiorite qui le montre au début de son règne, un obélisque en granit rose, ou des sphinx coiffés du némès.
Le parcours fait ensuite référence aux guerres qui ont marqué le règne de Ramsès II, comme celle menée contre l’empire hittite en Anatolie (actuelle Turquie), racontée à travers une grande animation virtuelle retraçant l’importante bataille de Qadech.
Par ailleurs, une grande maquette, des écrans et des décors nous font plonger dans l’impressionnant temple d’Abou Simbel en Nubie, creusé dans la montagne. Si les sculptures et les bijoux égyptiens présentés dès l’entrée demeurent remarquables, on regrette toutefois que les cartels soient aussi pauvres durant le parcours.
La mémoire rend immortel
De son vivant, Ramsès II a fait construire de nombreux temples, sculptures et pyramides à son effigie, afin d’assurer sa postérité. À sa mort, les pharaons et le peuple égyptien ont continué à le vénérer et à faire perdurer sa mémoire. La deuxième partie de l’exposition met en lumière cette admiration sans faille.
Dès son accès au pouvoir, son cercueil commence à être préparé par les artistes à son service, et sera enterré dans la Vallée des Rois, à l’intérieur d’une fosse de 868 m2. Afin de saisir l’importance du funéraire dans le monde égyptien, de nombreux reliquaires et momies d’animaux inédites sont présentés, comme celles de crocodiles, chats ou scarabées !
On découvre aussi des cercueils, masques funéraires, colliers, doigtiers et cercueils à canopes en matériaux précieux des XXIe et XXIIe dynasties. En premier lieu, l’une des pièces les plus extraordinaires est sans doute le cercueil externe de l’artiste Sennedjem, dont les nombreuses décorations ont gardé une couleur resplendissante. Mis en valeur dans une salle, il peut être contemplé de tous les côtés par les visiteurs.
On découvre aussi le cercueil en argent à tête de faucon de Chéchonq II, roi de la XXIIe dynastie, dont le cartonnage rehaussé de feuilles d’or, très fragile, est aussi présenté pour la première fois en France.
Le tombeau final
Parmi les sculptures et les temples, l’exposition présente aussi un grand nombre de bijoux rayonnants, qui sont là aussi – hélas – bien peu commentés. Les pièces sont splendides et attirent le regard, comme le bracelet incrusté de gemmes de Chéchonq II, ou le large collier de perles d’or et de cornaline en forme de fleurs de pavot, dont les matériaux précieux renvoient au corps divin et donc, à la vie éternelle.
Toutefois, elles semblent flotter dans les grands espaces sans être véritablement rattachées à leur contexte historique – quelques vidéos sont tout de même là pour commenter certains objets, mais les cartels seraient mieux appréciés lorsqu’on se rend à une exposition. De même, une certaine incompréhension demeure quant à la conception du parcours : on se doute qu’il nous mène à la pièce phare, le tombeau de Ramsès II, mais à travers quels discours ?
On comprend tout de même que cet ensemble de bijoux, masques ou vases en or est une manière de dévoiler toute la richesse de la culture égyptienne, au-delà du célèbre trésor de Toutankhamon. Les colliers en or de Psousennès Ier ou le cercueil et les trésors de Chéchonq II illustrent bien tout le raffinement de cette civilisation fascinante. À la fin, la fameuse tombe de Ramsès II est présentée dans une salle reconstituant les décors historiques. Si elle a été pillée dans l’Antiquité et vidée par les prêtres d’Amon au Ier millénaire av. J.-C., sa momie fut déposée dans une cachette de la montagne thébaine : d’après sa physionomie, une vidéo reconstitue alors le visage du pharaon tel qu’il aurait pu être au fil des âges.
Dans une dernière salle épique, deux grands écrans présentent brièvement l’étude de cette tombe, ainsi qu’une statue colossale en calcaire provenant du musée de Charm el-Cheikh, jamais présentée en France auparavant. En sortant de l’exposition, on reste émerveillé par la magnificence et l’inventivité des pièces égyptiennes, bien qu’une certaine confusion persiste tout de même. Le spectacle était délicieux, mais a-t-on véritablement appris quelque chose ?
Ramsès II et l’or des pharaons
La Grande Halle de La Villette
211 avenue Jean-Jaurès, 75019 Paris
Du 7 avril au 6 septembre 2023
Romane Fraysse
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Image à la une : © Romane Fraysse