Dans le Paris du XIIIe siècle, des femmes, veuves ou célibataires, se regroupaient au sein de communautés au sein desquelles elles étudiaient et travaillaient comme bon leur semblait. Intéressons-nous à ces femmes libres qui ont suscité l’ire des ecclésiastiques de leur époque. Et plongeons dans un Moyen Âge loin des préjugés auxquels on le rabaisse souvent…
Les béguines du Marais
Apparu à Liège au XIIe siècle, le mouvement des “béguines” se diffuse ensuite en France et dans le nord de l’Europe. A Paris, les archives mentionnent l’existence d’une communauté de béguines située dans le Marais. Elle regroupe des femmes laïques, veuves ou célibataires, venues de leur plein gré. Leur maison est située non-loin de l’actuelle rue Charlemagne, adossée au rempart de Philippe Auguste. Elles sont 400, chapeautées par une “maîtresse” nommée par l’aumônier du roi, et vivent en quasi-totale autonomie financière et juridique !
Qui sont-elles ?
A la fois empreintes d’une nature religieuse et émancipées du joug masculin, les béguines sont inclassables pour les historiens. Elles ressemblent à des communautés ecclésiastiques mais s’en détachent aussi par bien des aspects. Déjà , elles refusent le mariage et préfèrent rester entre elles, comme des sœurs religieuses. Mais, contraierement à ces dernières, les béguines ne formulent aucun vœu et ne sont donc pas astreintes à un quotidien de prières. Cela dit, elles prônent un idéal de pauvreté évangélique, à la manière des ordres mendiants (franciscains). Elles sortent en ville pour exercer la charité chrétienne, visiter des hôpitaux et faire l’aumône aux miséreux.
La fin des béguines
Comme les réguliers masculins, les béguines lisent des textes en grec et latin, ce qui est alors considéré comme une atteinte aux bonnes mÅ“urs par la hiérarchie ecclésiastique. Ainsi, le choix du célibat ou de la virginité pour ces femmes s’accompagn aussi d’une émancipation culturelle et intellectuelle… Leur indépendance vis-à -vis de toute forme de domination masculine suscite d’ailleurs l’indignation des pouvoirs. Une réticence qui se transforme, dès le XIVe siècle, en persécution contre elles. En 1311, le concile de Vienne mais un coup d’arrêt à l’expansion de ce mouvement béguinal en France. Leur avant-gardisme féministe n’aura pas survécu mais nous gardons tout de même un souvenir d’elles : l’expression “avoir le béguin pour quelqu’un” ! Et oui, il fait référence au couvre-tête des béguines, car “être coiffé de quelqu’un” voulait alors dire “être aveuglé par quelqu’un”. Enfin, pour découvrir d’autres histoires passionnantes sur l’histoire des femmes à Paris, participez à notre prochaine visite guidée insolite sur les Dames du Marais !
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Crédit photo de une : Miniature tirée d’un manuscrit de La Cité des dames de Christine de Pizan attribuée au Maître de la Cité des dames, BNF.
MAJ 05/23 AC