Connue pour son romantisme, son amour de la mode ou de la gastronomie, Paris se pose comme un temple culturel d’ordre mondial pour de nombreuses raisons. Sa richesse historique et patrimoniale, ses monuments et places publiques en font un paradis pour les grands amateurs du genre, tout comme les nombreux rendez-vous artistiques organisés chaque année. Et si la culture serait incomplète sans une touche de cinéma, le cinéma serait lui incomplet sans un peu de Paris…
L’autre trésor de ce quartier historique de Paris
Non content d’accueillir chaque année des tournages, français comme internationaux, et d’avoir été immortalisée dans des scènes mythiques du 7ème Art, la capitale cultive également cet amour par la présence de cinémas emblématiques. Difficile de ne pas citer l’emblématique Grand Rex ou le dépaysant Louxor, mais les amoureux de pellicules, de scénario et de films indépendants savent que c’est en plein cœur du Quartier Latin que se trouve un véritable monument. Comme si le quartier ne regorgeait pas suffisamment de merveilles historiques, c’est au 51 rue des Écoles que Le Champo, du haut de ses 86 ans, continue d’offrir aux cinéphiles des projections et des événements mémorables. Pourtant, comme de nombreux monuments méconnus, on pourrait presque passer devant sans s’en rendre compte, avec sa petite porte, sa petite salle d’accueil, son étroit couloir menant à ses deux petites salles de 130 places chacune et, surtout, par le fait d’être cerné par l’imposante Sorbonne et le riche Musée de Cluny. Tout comme son apparence est plutôt discrète, l’histoire du Champo est également méconnue. Tenant son nom de la rue attenante, le Champollion propose sa première séance le 22 juin 1938 après avoir été créé sur l’emplacement d’une ancienne librairie du quartier latin. Il est repris dès l’année suivante par Roger Joly, un industriel de l’éclairage passionné de cinéma, qui demeurera propriétaire jusqu’en 1980, année à laquelle il laisse la gestion du cinéma à sa fille, Christiane Renavand.
Un repère pour les grands noms du cinéma
Depuis toujours, le Champo est un cinéma “à contre-courant”. À son arrivée, Roger Joly prend un pari fou en programmant Drôle de drame, de Marcel Carné, dont la projection a pourtant été un fiasco sur les Champs-Elysées. Mais au Champo, le film reçoit un triomphe. Rares étaient les cinémas d’Art et d’Essai à l’époque, et le cinéma du 5ème arrondissement va en devenir un fier représentant, avec son lot de fidèles. Claude Chabrol disait à ses amis qui le cherchaient qu’ils pouvaient toujours le trouver au Champo, tandis que François Truffaut en parle même comme de son “quartier général”. Entre les étudiants et les cinéphiles de la première heure, d’autres noms prestigieux comme René Clair, Louis Malle ou Jacques Tati, dont le nom est aujourd’hui associé à celui du Champo, font de ce lieu un temple sacré du cinéma. Aujourd’hui encore, des artistes tels que Louis Garrel ou Quentin Tarantino, lorsqu’il est de passage dans la capitale, ne manquent pas de se faire une toile dans ce survivant. Menacé par des projets immobiliers, il a fallu attendre un arrêté en 2000 pour que la façade et les salles soient en totalité inscrites au titre des monuments historiques, pérennisant ainsi l’activité et la sauvegarde du cinéma.
Des projections qui sortent de l’ordinaire
Aujourd’hui, le Champo continue donc, pour le plus grand bonheur des cinéphiles, de vibrer. Notamment grâce à une programmation bien spécifique, où l’on réédite les vieux films classiques du cinéma français ou étranger, projetés seulement en 2K. Une volonté toujours aussi tenace et pleine de charme d’aller à contre-courant des cinémas classiques de Paris Deux salles sont à disposition dont chacune à sa particularité esthétique. Se replonger dans Casanova Un adolescent à Venise ou La Belle de Rome dans une salle obscure est une expérience à ne pas manquer, encore plus quand la salle en question est aussi fascinante. Dans la salle 1, des projecteurs bleus traversent la pièce du mur au plafond. Dans la salle 2, les spots lumineux au plafond donnent l’impression de visionner un film sous un ciel étoilé, comme si l’on était partis pour une séance en plein air. Outre les programmations, le cinéma attire également pour les événements réguliers qui y sont organisés, comme en 2020 pour célébrer le centenaire de la naissance du dialoguiste et réalisateur Michel Audiard. Des projections de films emblématiques auquel avait collaboré le natif du XIVe arrondissement, à commencer par Les Tontons Flingueurs ou Le Cave se rebiffe, avaient alors eu lieu. Idem il y a quelques mois lorsque le temple de la Nouvelle Vague était devenu le temps d’une soirée… celui de l’horreur. À travers la Nuit des possédés, un double cycle nocturne de films d’épouvante, le cinéma parisien avait tenu à rendre hommage aux films d’horreur, un genre longtemps dénigré, avec la projection de classiques tels que L’Exorciste, Hérédité, The Strangers ou encore Malignant. Pour les férus d’arts martiaux, la nuit du 25 au 26 mai est d’ailleurs le prochain rendez-vous à ne pas manquer, avec la projection de films cultes tels que Matrix, Dragon Inn ou La Fureur du Dragon.
Le Champo – Espace Jacques Tati
51 rue des Ecoles
75005 Paris
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Image à la une : Le Champo © Only France via AFP