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Sur les traces du dernier maître des Templiers à Paris

Par Cyrielle

Il est le dernier grand maître des Templiers et, depuis que Maurice Druon en a fait son sujet de prédilection dans la suite de romans Les Rois maudits, il fait partie des figures les plus intrigantes de notre histoire. La légende voudrait, en effet, que Jacques de Molay ait lancé, au moment de succomber sous les flammes, une malédiction à l’encontre du roi Philippe IV le Bel, du pape Clément V, de l’inquisiteur Guillaume Humbert, et de leurs descendants pendant treize générations. Si cette légende n’a jamais pu être vérifiée et que de nombreux détails historiques manquent sur les Templiers, quelques marques du passage de leur dernier grand maître peuvent être retrouvées dans Paris. On est parti sur les traces de cette illustre figure de l’Ordre des Templiers.

L’enclos du Temple, six hectares en plein coeur du Marais

L’ordre du Temple est un ordre religieux et militaire créé en 1129 à l’occasion du concile de Troyes dans le but de protéger les lieux saints et les pèlerins en Palestine. Devenu en deux siècles la communauté la plus puissante de la chrétienté grâce à ses exploits militaires, l’ordre du Temple établit son quartier général dans la capitale française à une époque où les échecs successifs de ses croisades ont grandement affaibli son prestige.

À l’aube du XIVe siècle, les Templiers n’ont pour ainsi dire plus aucune croisade à mener. La plupart des chevaliers se reconvertissent alors en usuriers et se mettent à amasser les richesses. Le roi, qui doit de l’argent au Temple, et l’opinion commencent à s’interroger sur la légitimité de l’ordre, désormais établi au coeur de Paris, dans un vaste domaine fortifié s’étendant sur près de six hectares : l’enclos du Temple.

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La Tour du Temple en 1785 (© Histoires de Paris)

Le vendredi 13 octobre 1307, Jacques de Molay se trouve à Paris quand Philippe le Bel met en oeuvre sa grande rafle policière qui, des siècles plus tard, continue d’impressionner. Au petit matin et dans le plus grand secret, tous les membres français de l’ordre sont arrêtés par les sénéchaux du royaume. Jacques de Molay et les 140 Templiers de Paris sont expulsés de l’enclos du Temple. Quelques-uns sont tués, d’autres enfermés dans les prisons de la capitale.

Que reste-t-il de l’ancienne demeure des Templiers ? Absolument rien ! La tour du Temple (connue pour avoir été la geôle de Louis XVI et sa famille sous la Révolution), l’église Sainte-Marie, l’hôtel du Grand Prieur, la tour de César, et l’ensemble des bâtiments érigés dans l’enceinte de l’enclos ont disparu. Démolis, remplacés et rayés des cartes parisiennes au fil des siècles. Aujourd’hui, les seules traces du passage des Templiers à Paris sont des marques bleues peintes sur le sol de la rue Eugène Spuller, qui indiquent l’emplacement des tourelles et de la tour du Temple, ainsi qu’une plaque placée à l’angle de la rue Dupetit-Thouars et de la rue Gabriel-Vicaire, sur laquelle est dessiné un double plan de l’ancien domaine et des rues actuelles.

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Ce qu’il reste de l’enclos du Temple en 1734 (Plan Turgot)

Sur l’île de la Cité, l’emplacement du bûcher

Le 18 mars 1314, Jacques de Molay, emprisonné depuis la grande rafle menée par Philippe le Bel, est conduit sur l’île de la Cité, devant la Cathédrale Notre-Dame. Il doit y entendre le verdict de son procès, en compagnie de Geoffroy de Charnay, précepteur de Normandie, et de deux autres figures templières, Hugues de Payraud et Geoffroy de Gonneville. La sentence des juges est la prison à perpétuité pour crime “d’hérésie et de pratiques obscènes”.

Grandes Chroniques de France, Arrestation des Templiers
Jacques de Molay et les Templiers sont arrêtés dans l’enclos du Temple (miniature extraite des “Grandes Chroniques de France”, XIVe siècle).

Mais, alors qu’il n’avait jamais renié ses aveux en six ans d’emprisonnement, le grand-maître s’insurge contre sa condamnation, déclarant qu’il ne s’est pas rendu coupable des crimes qui lui sont reprochés et qu’il est victime d’une machination de la part de Philippe IV le Bel et du pape Clément V. Ces propos sont appuyés par ceux de Geoffroy de Charnay, son second. Les deux hommes savent que cette protestation leur vaudra une toute autre condamnation : en tant que relaps, ils ne sont plus protégés par le pape et doivent être condamnés au bûcher.

Jacques de Molay et Geoffroy de Charnay sont exécutés le soir même sur un bûcher élevé sur la petite île aux Juifs, rattachée à l’île de la Cité lors de la création du Pont Neuf à la fin du XVIe siècle. Aujourd’hui, elle constitue la partie méridionale de l’actuel Square du Vert-Galant, à deux pas de la statue d’Henri IV qui trône sur le terre-plein du pont, une dizaine de mètres plus hauts. Dans le square, une simple plaque commémorative rappelle les événements qui eurent lieu le 18 mars 1314.

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Cyrielle Didier