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C’est le 3 mai 1822 qu’est posée la première pierre du canal Saint-Martin. Sur ses 4,55 kilomètres, le réseau fluvial a bien changé durant ces deux cents ans, passant d’une zone industrielle à un lieu de flânerie. Du Premier Consul à aujourd’hui, celui-ci a connu de nombreux réaménagements pour s’adapter aux nouveaux usages, jusqu’au projet de végétalisation qui devrait être lancé en 2024.
Une quête hygiéniste
L’idée de créer un canal au sein de Paris germe sous l’Ancien Régime. En effet, malgré l’existence d’aqueducs et de puits, les Parisiens bénéficient de peu d’approvisionnement en eau potable, et ont surtout accès à l’eau polluée de la Seine. Aussi, lors du Premier Consul, Napoléon Bonaparte décide de mener à bien ce projet, face aux nouvelles épidémies dues aux mauvaises conditions d’hygiène. C’est le préfet de Paris, Gaspard de Chabrol, qui lance alors l’idée de poursuivre le projet de canalisation de l’Ourcq initié dès le XVIe siècle.
La création de ce nouveau canal est donc initiée au début du XIXe siècle, avec celle des canaux Saint-Denis et de l’Ourcq. Si le projet traîne face aux instabilités politiques, Louis XVIII le relance en le confiant à l’ingénieur Pierre-Simon Girard. Afin d’obtenir des subventions, la Compagnie des canaux de Paris est créée en 1818, et remporte le soutien de la Ville de Paris. Le préfet de la Seine pose alors la première pierre le 3 mai 1822 : après trois ans de travaux, le canal Saint-Martin est finalement inauguré par Charles X, le 4 novembre 1825.
Les réaménagements d’Haussmann
Les grands travaux du baron Haussmann vont forcément bouleverser l’avenir du canal Saint-Martin. En 1860, le préfet de la Seine prévoit de métamorphoser la capitale en grandes avenues, et le canal à l’air libre dérange alors ses projets dans les nouveaux arrondissements du nord-est. Pour cela, le cours d’eau est recouvert en partie par des voûtes autour du boulevard Richard-Lenoir, un quartier populaire dans lequel les troupes circulent en grand nombre. Toutefois, le trafic maritime doit continuer sous les voûtes, si bien que le niveau du canal est abaissé de 5,5 mètres.
Néanmoins, ces baisses du niveau de l’eau ont conduit à certains problèmes, notamment une forte sécheresse menant à l’arrêt de la navigation entre 1858 et 1865. Un décret impérial est alors lancé le 11 avril 1866 pour puiser de l’eau dans la Marine afin de maintenir un débit suffisant dans le canal de l’Ourcq, qui alimente le canal Saint-Martin. Cette technique permet ainsi de relever l’eau de douze mètres afin de combler le manque.
Le canal face à la modernité
Du XIXe au milieu du XXe siècle, le canal Saint-Martin connaît un véritable âge d’or : il irrigue la ville d’eau potable, et connaît une grande circulation de marchandises, d’approvisionnement et de matériaux de construction passant par le port de l’Arsenal et le bassin de la Villette. Mais dès les années 1960, la concurrence des transports routier et ferroviaire ralentit le transport fluvial : le trafic sur les canaux parisiens est en chute libre, entraînant une disparition progressive des usines, des entrepôts et des ateliers.
Le canal est même menacé durant un temps de disparaître, face à un projet d’autoroute urbaine qui devait emprunter son tracé, avant d’être abandonnée en 1971. Face à la gentrification progressive du quartier, et aux nombreux réaménagements, le canal est étudié par l’atelier parisien d’urbanisme, qui obtient son classement par Michel Guy, alors secrétaire d’État à la Culture. Pour le mettre en valeur, des quais sont alors rétablis dans les années 1970.
Une perspective écologique
En 2022, le canal Saint-Martin a fêté ses 200 ans. Un bicentenaire qui a engagé de nouveaux projets sur le site, en accord avec l’un des enjeux contemporains : l’écologie. Si le canal était autrefois un circuit servant l’activité industrielle, il est désormais un lieu de flânerie et de rassemblement. Ses quais n’accueillent plus de stocks de marchandises, mais sont désormais peuplés par les Parisiens. Pour l’adapter à ces nouveaux usages, la mairie du 10e arrondissement a présenté un projet de réaménagement, le lundi 20 novembre 2023.
Celui-ci prévoit notamment de privilégier les pistes cyclables en créant cinq mètres de chaussées de chaque côté du canal, ainsi que des promenades pour les piétons au bord de l’eau. Le site sera aussi végétalisé avec la plantation d’une cinquantaine d’arbres et la création d’espaces verts sur 3200 m2. Le chantier, qui devrait commencer en février 2024, prévoit de dévoiler dès 2026 un tout nouveau canal.
Cela initiera une continuité avec le canal de l’Ourcq, qui est devenu un vrai lieu de balade et de divertissement, avec ses terrasses, ses cinémas et ses pédalos. Plus loin, du côté d’Aulnay-sous-Bois, on s’enfonce en pleine nature, à la rencontre d’une importante faune aquatique et de paysages sauvages.
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