En recherche permanente de composition et de rigueur scientifique dans ses oeuvres, Georges Seurat est l’intellectuel des peintres avant-gardistes de la fin du XIXe siècle. Rejeté par les impressionnistes, qui l’ont un temps inspiré, on lui reproche de ne pas représenter la vie. Fondateur du pointillisme et chef de file du néo-impressionnisme, il meurt subitement à l’âge de 31 ans pendant une exposition durant laquelle il présentait son chef d’oeuvre particulièrement complexe intitulé “Le cirque“. Son fidèle suiveur Paul Signac dira alors: “notre pauvre ami s’est tué par trop de travail”.
Peintre à la rigueur scientifique
Né à Paris en 1859 dans une famille bourgeoise, Georges Seurat n’aura jamais le souci de vendre ses oeuvres pour vivre. Très tôt initié à la peinture, il souhaite depuis sa plus tendre enfance suivre une carrière de peintre et apporter sa contribution dans la recherche picturale. Jeune homme travailleur et sérieux, il ne sera toutefois pas un brillant élève à l’école des Beaux-arts, où il ne restera qu’un an. Pourtant très inspiré par les impressionnistes à ses débuts, il se mettra très tôt en tête de dépasser leur approche intuitive de la peinture par une démarche scientifique. Maniaque de la composition, on peut percevoir dans son premier grand tableau “Paysannes au travail” son désir de synthèse en réunissant dignité du travail, fruits de la récolte et communion avec la nature. Futur créateur de la technique pointilliste, Seurat y présente déjà des de couleur pure en croisillons. En 1883, son tableau “Une baignade à  Asnières” est refusé au Salon officiel mais retient une grande attention au Salon des Indépendants de 1884. Ce tableau, avec ses personnages simplifiés et comme figés dans leurs attitudes, baigne dans une étrange lumière où le temps semble arrêté : il marque une opposition radicale avec l’impressionnisme.
Peintre fondateur du Pointillisme
Au cours d’une séance de peinture sur l’Ile de la Grande Jatte à Asnières en compagnie de Signac, il multiplie les études pour une grande composition qui fera apparaître la division des couleurs en petits points se mélangeant optiquement : c’est alors sur son oeuvre “Un dimanche après-midi sur l’île de la Grande Jatte” qu’il applique pour la première fois son principe de pointillisme. Tout y est soigneusement ordonnancé, et le temps semble de nouveau arrêté pour un moment de beauté pure, de paix et de silence. Une réelle dignité se dégage du tableau et la luminosité est magnifiée par la division des tons. Pissarro fut tellement impressionné qu’il imposa Seurat et Signac à la 8e et dernière exposition des Impressionnistes de 1886, provoquant le retrait de Monet, Renoir et Sisley. De son côté, le critique d’art Félix Fénéon devint l’ardent défenseur du pointillisme en le rebaptisant le ” Néo-Impressionnisme”. Le mouvement, qu’on appelle d’abord chromo-luminarisme, puis divisionnisme, avant de devenir le pointillisme, s’étendra rapidement aux autres pays d‘Europe. Attentif au pouvoir d’expression des lignes et des couleurs,Georges Seurat renoue avec les grands principes de la composition en peinture : dans “Poseuses“, il remet le nu à l’honneur ainsi que la peinture en atelier en procédant à trois délicates études de corps féminin.
Pendant ses 10 années de carrière de peintre, Seurat ne quittera pas son attachement à la méthode scientifique. Se positionnant à l’opposé de la spontanéité impressionniste, il multiplie les dessins et croquis préliminaires (jusqu’à trente pour la Grande Jatte) et jure avec sa technique pointilliste. Qu’en serait-il de son apport dans la peinture s’il n’était pas mort si tôt ?
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