A la Une
Cela fait plusieurs mois que nous l’attendions : la Maison impressionniste Claude Monet, surnommée « la maison rose aux volets verts », ouvre au public dès le samedi 17 septembre 2022. Située tout près de la gare d’Argenteuil, elle dévoile un parcours interactif autour de ce mouvement, en mêlant dispositifs numériques et projections dans une scénographie immersive.
Le chalet suisse de Claude Monet à Argenteuil
C’est à la fin de l’année 1871 que Claude Monet, alors âgé de 31 ans, décide de s’installer à Argenteuil, petite ville située en Île-de-France que les Parisiens peuvent rejoindre depuis les années 1860 grâce à la nouvelle voie ferrée. Mais c’est exactement en 1874 que le peintre s’installe avec sa famille à l’adresse qui nous intéresse, située en face de la gare.
Cette maison de villégiature vient tout juste d’être construite par le charpentier M. Flamand, tout comme ses voisines sur l’actuel boulevard Karl Marx. Elle est conçue dans le style « chalet suisse », très apprécié à l’époque pour les citadins en manque de campagne. Située dans un quartier en pleine effervescence, cette maison de deux étages est constituée de nombreuses petites pièces, d’un jardin d’hiver et d’un petit jardin intérieur, qui séduit tout de suite le peintre.
Monet en fera ainsi son logement principal jusqu’en 1878, profitant de sa proximité avec la gare pour se rendre régulièrement à la capitale. C’est d’ailleurs ce contraste entre ville et campagne, industrialisation et calme champêtre, qui feront peu à peu fleurir les nombreuses thématiques propres à l’impressionnisme dans des paysages en pleine mutation.
Après son départ, la maison rose aux volets verts sera reprise par M. Flamand, qui décide d’y mener quelques travaux d’agrandissement : au fur et à mesure des propriétaires, le lieu se métamorphose : les pièces sont repensées, les décors sont détruits et le jardin perd peu à peu sa superficie.
Les débuts de l’impressionnisme
L’époque d’Argenteuil, c’est aussi celle des premiers essais impressionnistes. En sept ans, Monet y peindra 259 tableaux, dont plus de 150 présentant des scènes dans la ville : le bras de la Seine qui longe l’île Marante, la promenade sur les berges, le boulevard Héloïse, les régates ou la gare elle-même. L’année de son installation dans la fameuse maison rose, il organise avec ses camarades la première exposition parisienne des « Refusés » dans l’atelier du photographe Nadar. Mais l’événement rencontre peu de succès, et les Parisiens restent hostiles à cette peinture d’un nouveau genre. C’est d’ailleurs à cette occasion que le critique Louis Leroy désigne pour la première fois, et sans réelle sympathie, son tableau d’ « impressionniste ».
L’année suivante, la maison d’Argenteuil commence à accueillir le petit cercle des Refusés, dont Gustave Caillebotte ou encore Édouard Manet, qui y peint l’atelier de son ami. Cette maison de villégiature, avec un grand jardin, prouve que la situation financière de Monet devient plus confortable, maintenant qu’il commence à vendre quelques toiles. Ses œuvres rencontrent en effet un succès grandissant à l’étranger, en particulier à Londres où elles sont mises en lumière par Durand-Ruel. Ce dernier fait aussi rayonner les toiles de Monet lors d’une exposition dans ses locaux, en 1876 : là , les critiques sont moins virulents et commencent à saisir les enjeux de la peinture moderne. Un accueil qui encourage d’autant plus le maître impressionniste, continuant à réaliser plusieurs de ses séries emblématiques en 1877 et 1878, dont celle de la gare Saint-Lazare.
Un musée sans toile
Dès l’arrivée en train, on peut apercevoir à l’horizon cette jolie maison rose aux volets verts. Après quelques pas, on entre alors dans un petit jardin fleuri, où l’on découvre de plus près – et avec peu de recul – cette façade qui nous paraît presque vertigineuse. Depuis son acquisition en 2005, la municipalité a eu à cÅ“ur de rénover le lieu pour qu’il retrouve sa splendeur d’antan : les façades ont été ravalées, la toiture a été révisée, tandis que les balcons et lambrequins d’origine ont été refaits à l’identique.
Après quelques marches, on passe la porte du peintre impressionniste afin d’explorer les petites pièces de cette maison aux deux étages. Les architectes et les décorateurs ont souhaité retrouver l’atmosphère d’une habitation bourgeoise de la fin du XIXe siècle, en mettant en évidence les carrelages anciens et les parquets de chêne conservés, ainsi que les portes à panneaux avec leurs poignées en laiton. Chaque pièce est peinte dans une couleur pâle, passant du rose au vert ou au bleu. Le mobilier a, quant à lui, été chiné : on retrouve des buffets, des armoires, un bureau, une bibliothèque et un poêle de faïence… tout cela avec l’objectif de faire un retour au siècle des impressionnistes sans pour autant tromper le visiteur sur l’authenticité de ces meubles. Et bien entendu, on fait une pause dans le tendre jardin d’hiver, reconstruit d’après les peintures du maître impressionniste, avant de se rendre dans le petit jardin intimiste entièrement réinventé.
Mais si l’on s’attend à découvrir des tableaux de Monet, c’est raté ! Aucune acquisition de ses peintures n’a été faite par la Maison impressionniste Claude Monet. Le parcours est donc rendu interactif par des toiles virtuelles, des projections et des voix nous guidant dans l’œuvre de Monet et dans l’histoire d’Argenteuil. Ainsi, on trouve des installations numériques dans les armoires ou dans les tiroirs. Une toile projetée au mur se met en mouvement, et des copies de plusieurs peintres impressionnistes sont exposées dans une pièce – en ce moment, elles sont réalisées par un certain Antoine Mersali, mais ces réinterprétations changeront plusieurs fois par an. Au dernier étage, on découvre aussi la reconstitution du bateau-atelier de Monet, avec des exemples de ses œuvres inspirées des berges de Seine.
Une fois la visite terminée, on reste tout de même sur sa faim. Il faut avouer que cette maison a beaucoup de charme, mais cela ne fait pas tout. En vérité, elle doit être pensée comme une initiation à l’impressionnisme grâce aux différents dispositifs numériques qu’elle propose. Mais ne vous y rendez pas en pensant découvrir des toiles et des objets d’époque, ou bien la déception risque d’être grande !
Monet revisité par C215
Si les impressionnistes ont été les mauvais élèves des Salons du XIXe siècle, ils rencontrent aujourd’hui un succès phénoménal, en particulier Claude Monet. Considéré comme le maître de l’impressionnisme, celui que l’on représente toujours comme un vieil homme à la longue barbe blanche s’est fait tirer le portrait par l’un des artistes urbains français les plus célèbres de notre époque : C215.
Christian Guémy, de son vrai nom, est connu pour recouvrir les murs, les boites aux lettres et les armoires électriques de grands portraits colorés, toujours accompagnés d’une légende. Si l’artiste préfère célébrer les enfants, les amoureux ou les marginaux, il rend aussi hommage à de grandes personnalités.
On découvre ainsi un portrait monumental de Monet en plein cœur du centre-ville, dont une version de taille réduite est visible à l’entrée de la Maison impressionniste. Cette initiative s’inscrit dans le programme de musée à ciel ouvert défendu par la Ville, qui a déjà invité plusieurs autres artistes urbains à embellir les murs d’Argenteuil.
Maison impressionniste Claude Monet
21 boulevard Karl Marx, 95100 Argenteuil
Ouverture le 17 septembre 2022
Tarif : 5€
Romane Fraysse
A lire également : Giverny, une escale dans le tableau grandeur nature de Monet
