Quelle est la plus belle église de Paris ? Voilà un débat qui pourrait durer des heures, tant la question mérite réflexion et les avis peuvent être nombreux. Entre les églises Saint-Roch, Saint-Étienne-du-Mont, Saint-Sulpice ou encore Notre-Dame-du-Travail, sans oublier la Sainte Chapelle ou la basilique Sainte-Clotilde, il est bien difficile de dégager l’une d’entre elles au-dessus du lot. Surtout que, dans cette impressionnante liste, il ne faut pas oublier l’une des plus artistiques et non moins imposantes églises de la capitale…
Une histoire dont les origines remontent à près de 1000 ans
Pour attirer les visiteurs, une église doit pouvoir compter sur un ou plusieurs atouts, comme un style applaudi et reconnu depuis longtemps, une histoire emblématique ou une très bonne position géographique… La bonne nouvelle avec l’église Saint-Eustache, c’est qu’elle coche parfaitement ces trois points. Situé en plein centre de la capitale, au forum des Halles, l’édifice attire aisément bon nombre de curieux lors des beaux jours, entre deux arrêts dans le centre commercial ou dans les restaurants aux alentours. Quant à l’histoire, celle de l’Église Saint-Eustache commence au XIIe siècle lorsqu’une modeste chapelle est bâtie au centre de Paris, sur le chemin qui mène de l’Île de la Cité à la colline de Montmartre. Celle-ci est alors consacrée à Sainte-Agnès, une martyre qui a refusé de se donner au fils du préfet de Rome au nom de sa dévotion au Christ. Lorsque son prétendant a voulu la forcer à avoir des rapports intimes, les cheveux de la jeune femme ont poussé d’un coup pour couvrir son corps et la rendre intouchable. Le nom de Saint-Eustache date quant à lui de 1223, lorsque la chapelle devient une véritable paroisse, à la suite d’un don de reliques du Saint par l’Abbaye de Saint-Denis.
Un édifice qui aura connu mille vies
Enfin, parmi les points qui rendent une église marquante aux yeux des curieux, c’est bien évidemment son style architectural. S’il ne fallait qu’un seul mot pour décrire celui de Saint-Eustache, ce serait assurément “hybride”. Le mélange entre le gothique flamboyant, vue de l’extérieur, et le style Renaissance une fois à l’intérieur est un véritable spectacle à lui tout seul. Le chœur et les piliers de la nef avec leurs têtes d’anges et leurs feuillages de pierre viennent d’une esthétique renaissance, tandis que les ogives renvoient plutôt au style gothique flamboyant. Un mélange qui s’explique aussi par les nombreux chantiers qu’a connu l’édifice. Si la première pierre de l’Église Saint-Eustache actuelle est posée sous François 1er, le chantier dure presque 100 ans. En 1655, Colbert (dont le tombeau est présent dans l’église), ministres et contrôleur général des finances de Louis XIV, paroissien de l’église Saint-Eustache, fait aménager deux chapelles sous les tours de la façade. En 1793, pendant la Révolution, l’église fut entièrement vidée de sa décoration intérieure et fut même transformée en temple de l’Agriculture jusqu’en 1795, date de sa réouverture en tant qu’église. Au XIXe siècle, de grands travaux de réparations et de restaurations sont entrepris, menés notamment par Victor Baltard, qui dessine le buffet d’orgue, la chaire, le maître autel, et supervise la réfection de toutes les peintures.
De grands personnages de l’Histoire de France indissociables du lieu
Malgré une histoire pleine de bouleversements, ce n’est pas le chaos qui règne à l’intérieur de Saint-Eustache, mais bien un sublime spectacle. En plus d’un grand nombre de peintures murales du XIXe siècle et quelques magnifiques œuvres d’art comme des tableaux ou sculptures, l’église est aussi la maison de l’une des plus belles statues de Paris : la Vierge à l’Enfant de Pigalle. Une création sublimement entourée par trois grandes fresques : “La Vierge triomphante adorée par les Anges” ; “La Vierge étoile des marins” et “La Vierge consolatrice des affligés” par Thomas Couture. Et quand ce n’est pas un personnage biblique qui apporte du prestige à l’endroit, ce sont les figures historiques passées par là qui s’en chargent. L’église Saint-Eustache a en effet été le lieu de nombreux baptêmes (Richelieu, Molière, madame de Pompadour), de communions (Louis XIV) mariages (Sully, Lully) et sépultures et obsèques (Colbert, Scaramouche, La Fontaine…) de grandes personnalités. Indissociable de l’histoire de l’église, Colbert, contrôleur général des finances et secrétaire d’Etat de la Maison sous Louis XIV, y est inhumé en 1683. Celui qui a dirigé une grande partie du royaume du Roi-Soleil repose près de la chapelle de la Vierge dans un sarcophage noir sur lequel se trouve une statue le représentant à genoux et les mains jointes.
Un chef-d’œuvre architectural et musical s’y cache…
Parmi les chefs-d’œuvre à ne pas louper lors de votre prochaine visite à l’église Saint-Eustache, impossible de passer à côté du plus grand orgue de France. 8 000 tuyaux, 5 claviers manuels de 61 notes chacun et un pédalier de 32 notes, voici un instrument qui a su attirer les plus grands comme Hector Berlioz ou Franz Liszt et qui a fait résonner sa musique devant une certaine Elizabeth II. Des auditions d’orgue sont d’ailleurs accessibles au grand public tous les dimanches après-midis, pour quiconque souhaite assister à un grandiose spectacle. Restauré dans les années 90 par une maison hollandaise, l’orgue fait aujourd’hui la fierté de Saint-Eustache, dont on peut admirer sans peine la prestance depuis le forum des Halles ou le jardin Nelson Mandela.
Église Saint-Eustache
2 Impasse Saint-Eustache
75001 Paris
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Image à la une : Église Saint-Eustache © borisb17 / Adobe stock