Le périple de cette tortue géante commence bien loin des terres parisiennes puisqu’elle est pêchée en 1907 à Concarneau. Un léger détour pour une espèce qui vient habituellement des Antilles. Avec ses 350 kilos et son mètre 90, il s’agit d’une espèce unique en Europe, et sa médiatisation ne tarde pas.
La tortue est en effet achetée pour la modique somme de 25 francs par un mareyeur, qui l’embarque immédiatement dans un wagon à destination de Paris. L’animal prend alors la direction des halles pour y être exposée. Véritable attraction, on se presse de partout pour venir admirer le phénomène. L’écaille colorée et volumineuse de la tortue attire tous les regards. Certains jours, on parle d’environ cinq mille personnes venues l’admirer. L’engouement est tel qu’il faut même un service d’ordre et des agents pour porter l’animal et le protéger des violences de la foule.
Véritable phénomène naturel hors du commun, on convoque des naturalistes pour venir voir l’animal. Après le spectacle, vient l’heure des négociations pour récupérer l’animal. Le Muséum du Jardin des Plantes est averti, mais dispose de très peu d’argent. Surtout, l’établissement doit faire face à la concurrence de marchands, d’hommes d’affaires et même de dompteurs. La tortue est finalement adjugée pour 400 francs au propriétaire du magasin « Aux Quatre Saisons », situé rue de la Boetie. Pour l’anecdote, huit hommes sont nécessaires pour charger la bête dans la voiture. Cette nouvelle vie n’a rien d’idyllique pour la tortue puisqu’elle meurt peu de temps après. Dans la foulée, là voilà naturalisée par un taxidermiste, avant de finir au plafond du restaurant Chartier, rue du Pont-Neuf (1er arrondissement), comme élément décoratif. Ce qui était un phénomène devient ainsi un lustre électrique, à la vue des nombreux clients.
Quelques années plus tard, une autre tortue géante débarque dans la capitale et connaît un bien meilleur sort. Arrivée en 1923, la tortue géante des Seychelles Kiki élit domicile au Muséum d’Histoire naturelle. Bénéficiant cette fois d’une protection totale, Kiki s’éteint en 2009, à l’âge vénérable de… 146 ans !
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