À première vue, on aurait tendance à penser que les plaques de rues parisiennes se ressemblent toutes. Forme rectangulaire, écriture blanche sur fond bleu et vert, c’est même pour la plupart d’entre nous l’une des marques de fabrique du Paris authentique, au même titre que les kiosques à journaux ou les fontaines Wallace. Et les multiples répliques de plaques proposées à la vente dans les boutiques de souvenirs nous confortent dans cette idée. Pourtant, si nous levons les yeux pour prêter attention à ces éléments urbains, nous serions surpris de constater une variété de formes et de couleurs, loin des standards imposés. Partons à leur découverte…
PETITE HISTOIRE DES PLAQUES DE RUES
Les plaques de rue parisiennes n’ont pas toujours été celles que nous connaissons aujourd’hui. Il suffit d’ailleurs d’observer certains vestiges d’anciennes indications de rues, souvent placés à proximité des plaques actuelles, pour le comprendre. Près de la plaque de la rue Elzévir dans le 3ème arrondissement, on découvre, par exemple, l’ancien nom inscrit dans un rectangle gravé directement dans la pierre.
Cette méthode datant de 1729 avait remplacé, à l’époque, les premières plaques imposées par le lieutenant de police de la capitale un an plus tôt. Celles-ci étaient alors en fer blanc et de couleur ocre et noire. Malheureusement pour le lieutenant, elles furent rapidement dégradées par certains habitants mécontents du nom choisi pour leurs rues, qui se virent alors ordonner de les « remplacer par des tables de pierre de liais d’un pouce et demi d’épaisseur, de grandeur suffisante pour pouvoir y graver les mêmes noms et les mêmes numéros ». Et tout cela bien sûr, à leurs frais !
En plus de celle de la rue Elzévir, on retrouve encore aujourd’hui quelques rares gravures, près des plaques des rues des Petits Champs, Poulletier anciennement nommée Poultier ou encore des Grands Augustins.
Mais ce n’est en réalité que sous Napoléon Ier, au début du XIXème siècle, que l’usage des indications de rues est généralisé, en même temps que l’Empereur impose que les maisons soient numérotées dans un ordre croissant en partant de la Seine. Un arrêté les rend même obligatoires en 1805. Cette fois-ci, les plaques sont à la charge de la commune, et les inscriptions sur les plaques de fer se font à l’huile. Un nouvel ajustement est cependant nécessaire, l’huile s’effaçant trop facilement ! En 1844, le préfet de Seine Rambuteau prescrit l’utilisation de plaques en lave de Volvic émaillée, où le nom de la rue est inscrit en blanc sur un rectangle à fond bleu et à contours verts, très proches de celles que l’on fabrique de nos jours…
LES PLAQUES PARISIENNES AUJOURD’HUI
Pour voir apparaître les plaques telles que nous les connaissons aujourd’hui, il a fallu un dernier décret : datant de 1938 ce dernier précise que ces plaques doivent répondre à une norme précise « entre 0m70 et 1 mètre et, pour la hauteur, entre 0m35 et 0m50. Elles seront du modèle suivant: lettres ou chiffres blancs; fonds bleu azur; encadrement vert bronze de 3,5 cm de largeur, relevé d’effets d’ombre en filets blancs et noirs“. Celles qui sont fabriquées aujourd’hui respectent encore ces indications, même si la taille des plaques varie légèrement et qu’elles sont fabriquées à présent en tôle émaillée.
Pourtant, vous avez peut-être déjà remarqué que toutes les plaques de rues n’ont pas cette apparence. Certaines sont en effet moins classiques que la norme, comme celles de la rue d’Agar et de la Villa Flore, réalisées par Hector Guimard, architecte et figure incontournable de l’Art Nouveau, ou encore l’une de celles de la rue du Faubourg Saint Antoine, ressemblant à une œuvre de street art moderne. Le plus souvent, ces plaques artistiques surviennent en doublon de la signalétique traditionnelle.
De plus, on observe dans Paris certaines indications anciennes plus finement travaillées que les autres : moulures pour celles du Boulevard Montparnasse et de la rue de la Tour Maubourg, ou encore jolies mosaïques en faïence pour les plaques des rues Froidevaux, Singer ou Simon Le Franc. Ces plaques plus raffinées que la moyenne ornent souvent les avenues ou rues les plus prestigieuses de la capitale.
Certaines encore semblent être des clins d’oeil au nom qu’elles portent, comme la rue des Petits carreaux et ses carreaux de mosaïques, ou encore la rue de Provence et ses moulures effet “soleil” à l’arrière.