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Olympe de Gouges : révolutionnaire, pionnière féministe et avocate des laissés-pour-compte

Par Cyrielle

Née Marie Gouze dans la petite commune de Montauban en 1748, Olympe de Gouges n’était sans doute pas destinée à être l’une des figures publiques majeures de l’Histoire de France. Et pourtant, grâce à son esprit avant-gardiste, son impétuosité littéraire et son courage sans faille, elle s’est positionnée au fil des siècles comme la pionnière de l’émancipation féminine, la grande avocate des laissés-pour-compte et l’une des rares figures révolutionnaires restées bienveillantes jusqu’au bout. On dresse pour vous le portrait de cette personnalité hors du commun.

Une jeune Occitane arrivée à Paris pour entamer une carrière littéraire

Si Olympe de Gouges a vécu une grande partie de sa vie à Paris, c’est en Occitanie qu’elle passe sa jeunesse. Comme Louise Michel un siècle après elle, Olympe de Gouges est une fille illégitime : son père, qui ne l’a jamais reconnue, serait le marquis Jean-Jacques Lefranc de Pompignan, magistrat et écrivain. Sa mère, Anne-Olympe Mouisset, est la fille d’un drapier et avocat réputé de la région.

Dans le sud de la France, Olympe de Gouges, encore connue sous son nom de naissance Marie Gouze, passe une enfance conventionnelle aux côtés de sa mère et de son père officiel, un boucher de  Montauban. Tout change pourtant quelques mois après ses 17 ans : en octobre 1765, elle est mariée – sans doute de force, en tout cas contre sa volonté – à un marchand-traiteur répondant au nom de Louis-Yves Aubry. Ce dernier est un important client de la boucherie familiale, mais surtout un homme rustre et peu cultivé. Pour la future Olympe de Gouges qui s’intéresse de près au théâtre et à la littérature, ce mariage ressemble plus à un emprisonnement qu’autre chose. Un fils, Pierre Aubry, naît en 1766, quelques mois seulement avant le décès de Louis-Yves Aubry.

© Anonyme, Olympe de Gouges. Mine de plomb et aquarelle, dix-huitième siècle. Musée du Louvre.

Veuve et mère célibataire à même pas 20 ans, Marie Gouze prend la première décision émancipatrice de sa vie : elle quitte Montauban pour Paris et décide de prendre le nom d’Olympe de Gouges. À cette époque, ne pas conserver le nom de son mari défunt, c’est déjà faire preuve d’une sacrée audace ! Mais Olympe de Gouges ne fait que commencer : autodidacte, elle décide de poursuivre une carrière littéraire, aidée par le riche entrepreneur Jacques Biétix de Rosières, qui la présente à la haute société parisienne. Refusant fermement d’épouser cet homme malgré son excellente situation financière et l’amour qu’elle lui porte, Olympe de Gouges commence, très doucement, à se faire un nom dans le monde littéraire parisien.

Une femme de lettres aux multiples combats

On ne parle alors pas de son talent – beaucoup la considèrent comme illettrée et jugent très négativement ses écrits car elle n’a pas d’éducation officielle – mais pour les sujets qu’elle développe : elle est l’une des premières à dénoncer l’esclavage dans Zamore et Mirza ou l’Esclavage des Noirs (1784), elle met en avant la condition féminine dans Le Mariage inattendu de Chérubin (1786) et appelle même à des réformes politiques et sociales radicales dans Lettre au Peuple ou projet d’une caisse patriotique, par une citoyenne (1788).

Noirs, femmes, enfants, démunis, malades… Olympe de Gouges prend le parti de tous les laissés-pour-compte et n’hésite pas à contester l’ordre établi. La Révolution française approchant, elle dénonce et condamne toujours plus fort : essais politiques engagés, pièces de théâtre accusatrices, brochures politiques, brûlots placardés dans Paris… Son audace et son courage semblent ne pas avoir de limites.

L’auteure de la fameuse Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne

C’est en septembre 1791 qu’Olympe de Gouges rédige son texte le plus connu, une Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne copiée sur la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Dénonçant l’absence des femmes dans le projet porté par les révolutionnaires, elle affirme, dans son Préambule, que « l’ignorance, l’oubli ou le mépris des droits de la femme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des gouvernements ». Cette Déclaration, adressée à la reine Marie-Antoinette, dénonce en 17 articles la « tyrannie perpétuelle que l’homme » oppose à la femme et affirme que la « femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits ». Ce manifeste deviendra l’un des textes fondamentaux du féminisme au XXe siècle.

Mais contrairement à ce que beaucoup pensent aujourd’hui, ce n’est pas ce texte qui lui valut de monter sur l’échafaud, mais le manifeste Les trois urnes, publié deux ans plus tard, en 1793. Dans ce texte affiché dans tout Paris, elle dénonce avec virulence les « criminelles extravagances » de la Terreur et s’en prend violemment à Marat et Robespierre (sans jamais les citer néanmoins), « ces hommes perfides et altérés de sang [qui veulent] nous vendre aux Puissances ennemies ; ne jurant que par la République, et n’attendant que le comble du désordre, pour proclamer un roi ». Arrêtée le 20 juillet 1793 alors qu’elle placardait elle-même cette affiche, elle est condamnée à mort et exécutée le 3 novembre 1793.

Quelques jours plus tard, le 17 novembre 1793, La Feuille du Salut Public, la gazette officielle des révolutionnaires, justifiera sa condamnation par ces mots : « Olympe de Gouges, née avec une imagination exaltée, prit son délire pour une inspiration de la nature. Elle commença par déraisonner et finit par adopter le projet des perfides qui voulaient diviser la France : elle voulut être homme d’État et il semble que la loi a puni cette conspiratrice d’avoir oublié les vertus qui conviennent à son sexe ».

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