Créé au début du IXe siècle, le pèlerinage de Compostelle est une des marches les plus grandes et les plus célèbres d’Europe. Les routes du pèlerinage, longues d’environ 1 500 kilomètres à destination de Santiago de Compostela, se rejoignent sur une route bien connue : le “camino francés”. Depuis les années 1990, les routes du pèlerinage jouissent d’un regain d’intérêt et d’une affluence croissante, comme en témoignent les plus de 30 000 marcheurs recensés sur les chemins de Compostelle en 2018. Au-delà de la procession religieuse, ce pèlerinage est aussi l’occasion d’échanger, de partager, de voyager spirituellement pour se ressourcer ou se reconnecter à la nature. Mais il s’agit aussi d’une fabuleuse occasion de trouver sur son chemin des villages incroyables et injustement méconnus…
L’histoire d’un village, mais aussi d’une illustre famille
Parmi les nombreux villages faisant office d’étape sur le chemin de Compostelle, Estaing fait assurément partie des plus marquants. Situé à environ 35 kilomètres de Rodez et de Conques, à l’entrée des gorges du Lot, le village de moins de 500 habitants a tout du décor de carte postale. On pourrait même parler du conte de fée puisque l’arrivée à Estaing se fait en empruntant l’impressionnant pont gothique, avant de découvrir son château et l’histoire d’une illustre famille de seigneurs. Classe au titre des Monuments historiques depuis 1945, le château d’Estaing possède une histoire et une architecture toutes deux remarquables. Installé sur un promontoire dominant le Lot, le château fut pendant huit siècles la résidence de la famille d’Estaing, l’une des plus illustres du Rouergue (ancienne province correspondant à l’actuel département de l’Aveyron). Plusieurs membres de la famille d’Estaing, qu’ils aient été militaires ou religieux, figurent en effet dans l’histoire de France, qu’il s’agisse de Tristan, héros de la bataille de Bouvines en 1214, Pierre, cardinal au XIVème siècle, François, évêque de Rodez au XVIème siècle ou encore Charles-Henri, amiral et commandant la flotte française envoyée pour soutenir la guerre d’Indépendance aux Etats-Unis.
Une plongée en pleine période médiévale
Tandis que la branche aînée de la famille d’Estaing s’éteint en 1794, le château est acquis en 1836 par les religieuses de Saint-Joseph pour en faire un couvent, une école et une maison de retraite. Ce n’est qu’en 2000 que la commune rachète le château, pour le revendre en 2005 à l’ancien président de la République Valéry Giscard d’Estaing, son frère Olivier et leur cousin Philippe. Débute alors un programme de restauration qui a pour mission de redonner au château son aspect d’origine et d’en faire un lieu de souvenirs. Constitué de bâtiments de hauteurs différentes organisés autour d’une terrasse, le château d’Estaing est un curieux, mais inévitable, mélange de plusieurs bâtiments des XVe, XVIe et XVIIe siècles construits autour d’un ancien donjon carré dont le sommet est cantonné de cinq tourelles et d’une terrasse qui domine le Lot. Sans oublier la chapelle construite au xxe siècle à côté de celle des seigneurs d’Estaing, datant du XVe siècle. Une balade dans le village d’Estaing, c’est aussi l’occasion d’admirer les belles façades datant des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles servant de décor à la fête médiévale. Car oui, chaque deuxième week-end de septembre est l’occasion de replonger en plein Moyen-Âge, alors que les troubadours animent les rues d’Estaing avec leurs jongleries et musiques traditionnelles et que le marché médiéval accueille les produits du terroir et les œuvres d’artisans, avant de laisser place au traditionnel banquet du samedi soir.
Des trésors du patrimoine présents à chaque coin de rues…
Mais qui dit Estaing dit aussi le fameux pèlerinage de Compostelle. Une balade dans le village pousse tous les curieux à découvrir l’église qui abrite les reliques de Saint-Fleuret. Construite au XVe siècle, elle est classée monument historique, tout comme la croix en pierre sculptée qui se trouve sur son parvis et qui rappelle que nous sommes sur les chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle. Chaque année, la Procession de la Saint-Fleuret prend place le premier dimanche de juillet : une procession costumée, à la fois reconstitution historique et acte religieux, qui défile dans les rues du village pour glorifier Saint-Fleuret. Si le Moyen-Âge est parfaitement retranscrit à Estaing, on peut en dire autant de la Renaissance, parfaitement représentée par le Collège. Construit dans les années 1520-1530 pour accueillir les six prêtres de la fraternité St Jean de l’Ouradou, il arbore de nombreux détails sobres mais de caractère, comme sa porte d’accès en bois clouté et au verrou en fer forgé, l’écusson aux armes d’Estaing ou encore une étonnante passerelle à balustres de pierres à découvrir dans la rue du Collège. Enfin, autre symbole du village, l’imposant pont gothique, classé depuis 1998 au patrimoine mondial de l’humanité de l’UNESCO au titre des chemins de St Jacques de Compostelle. Il fut achevé au début du XVIème siècle sous l’impulsion de François d’Estaing dont la statue trône au milieu du pont, face à la célèbre croix reproduite en bijouterie par le joaillier Henri Lesieur. Une belle manière d’accueillir curieux et pèlerins dans un cadre digne des décors de film les plus époustouflants, pour une virée qui promet d’en mettre plein la vue.
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