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Le jour où le maire de Paris fut assassiné

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En 1358, Paris vit des jours troubles. Nous sommes en pleine guerre de cent-ans (1334-1453) et les luttes d’influence entre les différents « partis » pour accéder au trône de France font rage. Au milieu de ce tumulte, la personnalité d’Etienne Marcel (1305-1358) est centrale. Ce dernier est en effet le prévôt des marchands de Paris (ancêtre du poste de maire de Paris) et est passé à la postérité pour avoir tenté de prendre le pouvoir…

Etienne Marcel, le représentant du peuple de Paris

Dans les années 1350, la France et son roi Jean le Bon (de la famille des Valois) sont en guerre contre la couronne d’Angleterre. Cette guerre est motivée par la nécessité de trouver des expédients économiques pour la France (grâce aux pillages notamment…) et ainsi surmonter la crise économique qui touche le royaume depuis le début du XIVe siècle. Mais les défaites s’enchaînent (depuis la défaite de Crécy) et la légitimité des Valois est fortement ébranlée.

Profitant des faiblesses françaises, deux personnalités réclament le trône de France à la place de Jean le Bon : le roi Anglais, Edouard III, et Charles de Navarre. Tous les deux se posent en successeur légitime de Philippe le Bel, illustre roi de France entre 1283 et 1314.

C’est aussi dans ce contexte de crise qu’un certain Etienne Marcel, riche marchand drapier parisien, devient prévôt des marchands de Paris, en 1354 : celui-ci est alors investi de nombreux pouvoirs, notamment militaires, politiques mais aussi économiques. Etienne Marcel est très populaire parmi les artisans et boutiquiers, qui composent le gros de la population parisienne au XIVe siècle, et fait entendre une voix très critique contre le roi de France Jean le Bon.

Or, Jean le Bon est fait prisonnier par les Anglais après la désastreuse bataille de Poitiers en 1356 et un traité humiliant pour la France est signé à Londres : ce traité donne notamment la Guyenne et une partie de la Bretagne à l’Angleterre, soit 1/3 du territoire français qui passe à l’ennemi ! En raison de l’absence de Jean le Bon en France, c’est son fils, Charles (à ne pas confondre avec Charles de Navarre), qui assure « l’intérim » : cette période s’appelle la régence. Très vite, le régent convoque à Paris des Etats généraux pour lever des impôts de guerre importants. Couplée à une forte inflation, cette augmentation fiscale est très mal perçue par les quelques 200 000 Parisiens, dont la grande majorité se trouve exsangue en 1356. Incapables de payer leurs loyers et de se sustenter, humiliés par le traité de Londres les Parisiens cherchent un homme providentiel et réclament des réformes !

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La Conciergerie de Paris, ancien palais des rois à l’époque médiévale.

C’est pourquoi le « maire » de Paris Etienne Marcel prend fait et cause pour les artisans et les pauvres Parisiens face au régent, ce qui l’amène aussi à chercher des soutiens parmi les rivaux du roi de France…

Etienne Marcel maître (éphémère) de Paris…

Etienne Marcel va user de ses relations avec le monde des commerçants parisiens, pour gagner en visibilité. Marcel va à plusieurs reprises haranguer la foule parisienne et chercher à instaurer un climat politique instable pour prendre l’ascendant sur le régent Charles. Surtout, le 22 février 1358, Étienne Marcel déclenche une émeute réunissant plusieurs milliers de Parisiens, dans le but d’envahir le palais de la cité, où réside le régent et ses soutiens. L’émeute menée par Etienne Marcel se transforme en bain de sang : deux maréchaux sont massacrés sous les yeux du dauphin. En signe d’humiliation, Marcel oblige ensuite le régent à se coiffer du bonnet rouge et bleu des émeutiers (aux couleurs de Paris) mais ne le tue pas, croyant pouvoir le manipuler. Etienne Marcel et le peuple de Paris semblent avoir remporté une bataille décisive.

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Le meurtre des maréchaux du dauphin, par les soutiens d’Etienne Marcel

Après avoir réuni et félicité les émeutiers place de grève, en face de la maison aux piliers (l’Hôtel de ville de l’époque), Etienne Marcel s’arroge un pouvoir politique considérable : il a réussi, temporairement, à faire céder le roi à ses exigences.

La chute d’Etienne Marcel

La politique d’Etienne Marcel vise en premier lieu à réduire les prérogatives royales en matière fiscale et réclame une monarchie contrôlée. Toutefois, Paris n’est pas la France, et Etienne Marcel paraît bien seul pour mener cette politique réformatrice, d’autant plus que sa rébellion contre le pouvoir politique, considéré comme une émanation de Dieu, passe très mal auprès des nobles et des ecclésiastiques du royaume. Peu de villes (si ce n’est Amiens et Arras) se rangent du côté du projet réformateur d’Etienne Marcel.

Grisé par ses premiers succès, Etienne Marcel apporte également son soutien aux paysans révoltés du nord de Paris. Les « grandes jacqueries », c’est-à-dire les révoltes paysannes, battent leur plein contre certains seigneurs, ce qui suscite une peur et une réaction agressive des puissants du royaume. Dotés de moyens militaires très faibles, les « jacques » ne font pas le poids et sont défaits à de nombreuses reprises. Sentant le vent tourner, beaucoup de partisans d’Etienne Marcel fuient la capitale, voire rentrent dans l’opposition du prévôt des marchands.

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Miniature de Loyset Liédet, BNF, Fr.2643.

Acculé, victime de calomnies, Etienne Marcel finit par être assassiné dans la nuit du 31 juillet 1358. Après une prise d’assaut de l’Hôtel de ville, le régent et ses soutiens reprennent la main sur Paris…

Etienne Marcel resta dans les mémoires comme un homme ayant fortement ébranlé l’autorité royale. Toute une historiographie, notamment sous la Troisième république (1875-1940) présente alors Etienne Marcel sous les traits d’un révolutionnaire et d’un ami du peuple. Témoignage de cette image positive accolée à la personnalité d’Etienne Marcel, une statue équestre à son effigie fut installée en face de l’Hôtel de ville, haut-lieu symbolique pour l’ancien maire de Paris. De plus, une station porte également son nom…

Statue équestre représentant Étienne Marcel devant l’Hôtel de ville, Antonin Idrac (fin XIXe siècle)

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