Typique de l’architecture commerciale de la fin du XIXe siècle, le « Centorial », nom porté depuis 1996 par l’immense édifice installé entre la rue du 4 septembre et le boulevard des Italiens au niveau de la rue de Gramont (2e arrondissement), est l’un des immeubles les plus majestueux de Paris. On part à la découverte de ce joyau architectural de la fin du XIXe siècle, témoin de l’époque où l’architecture bancaire était à son apogée.
Un palais d’argent, image de marque du Crédit lyonnais
Situé entre le Palais Brongniart et l’Opéra Garnier, cet édifice érigé entre 1876 et 1913 est l’un des nombreux exemples de l’architecture bancaire de la fin du XIXe siècle dans le quartier. Il est pourtant l’un des rares à porter, près de 110 ans après son achèvement, tant d’éclat et de prestige. Cela, grâce à sa taille, d’abord : l’édifice occupe l’intégralité du quadrilatère formé par le boulevard des Italiens et les rues de Gramont, de Choiseul et du 4 septembre… soit près d’un hectare au coeur du 2e arrondissement ! Mais son prestige vient surtout de sa façade, digne des plus beaux palais parisiens.
Construit par et pour le Crédit lyonnais, l’édifice est l’oeuvre de deux architectes renommés : débutée par l’architecte néerlandais William Bouwens Van der Boijen – à qui l’on doit également le sublime hôtel particulier aujourd’hui occupé par le Musée Cernuschi – la construction sera finalisée par Victor Laloux, qui avait réalisé quelques années plus tôt la gare d’Orsay, actuel musée.
Sa création dans un style florissant typique de la période post-haussmannienne n’est pas le fruit du hasard ou une simple volonté d’être dans l’air du temps : les patrons du Crédit lyonnais voulaient que l’édifice soit suffisamment grand pour accueillir une foule de coffres-forts dans ses sous-sols (il y a cinq étages de sous-sol !), visible de loin pour attirer l’oeil et, surtout, aussi majestueux que possible afin d’en mettre plein la vue à de potentiels investisseurs. Et quoi de mieux que de s’inspirer des plus belles constructions françaises pour donner de l’éclat à un édifice ?
Une façade inspirée du Louvre…
Ainsi, la partie la plus ancienne, donnant sur le boulevard des Italiens, n’est autre qu’une reproduction libre du pavillon de l’Horloge du Louvre. On y retrouve le même agencement de façade, presque les mêmes cariatides, les mêmes colonnes corinthiennes, et une horloge très proche de celle du pavillon du Louvre. Les ornementations du siège du Crédit lyonnais sont certes un peu plus arrondies et il manque un étage à l’édifice, mais on n’est vraiment pas loin de la copie conforme !
La seconde façade monumentale, celle donnant sur la rue du 4 septembre, est tout aussi impressionnante : surmontée du nom de l’édifice – Le Centorial, depuis 1996 – elle se révèle plus proche du style haussmannien, plus épurée et parfaitement symétrique, mais regorge de petits détails qui méritent le regard. Ses cariatides centrales, son immense fenêtre en arc, ses différents médaillons représentant le blason lyonnais ou des lys français, ses colonnes corinthiennes… Tout est parfaitement agencé et ordonné !
…et des escaliers inspirés de Chambord !
Si vous avez la chance de pouvoir entrer dans l’édifice, vous découvrirez alors la suite d’un spectacle qui paraît sans fin tant cet immeuble est immense : côté boulevard des Italiens, l’édifice cache une superbe rotonde sous coupole vitrée, dans laquelle se dresse un escalier d’honneur absolument magnifique. Cet escalier à vis et à double révolution est directement inspiré de celui du château de Chambord.
De l’autre côté, on pourra découvrir une autre coupole, agrémentée d’un hall et d’une immense verrière métallique. Cette partie, ravagée par un incendie le 5 mai 1996 au petit matin, a été réhabilitée au début des années 2000 et est aujourd’hui la propriété d’un fonds d’investissement et accueille un centre d’affaires. Son nom, Centorial, date d’ailleurs de cette époque : l’édifice a été renommé ainsi afin de pouvoir conserver le sigle CL sculpté sur la façade.