Pour beaucoup, l’histoire des transports en commun dans Paris commence à la fin du 19e siècle avec l’arrivée du tramway, puis plus tard du Métropolitain. Véritable marque de fabrique de la capitale aujourd’hui, l’idée date pourtant d’une époque plus ancienne. En effet, dès le 17e siècle, on attribue à Blaise Pascal l’idée du carrosse à cinq sols, considéré comme l’ancêtre de l’Omnibus.
Blaise Pascal à l’origine de ce système révolutionnaire pour l’époque
Seconde moitié du 17e siècle… Louis XIV règne sur le royaume et Paris a déjà tout d’une grande ville. Elle est, en effet, la seconde ville la plus peuplée au monde (plus de 500 000 habitants) derrière Londres. À l’époque déjà , se déplacer dans Paris est un véritable challenge… Seuls quelques riches privilégiés peuvent se permettre d’emprunter un carrosse.
En novembre 1661, Blaise Pascal pense avoir une idée révolutionnaire pour régler ce problème et fonde une société avec quelques collaborateurs. Le mathématicien et philosophe y investit même une grande partie de sa fortune. Avec ses associés, il présente un projet qui consiste à exploiter des carrosses qui feraient toujours les mêmes trajets dans Paris d’un quartier à l’autre, le tout pour cinq sols et qui partiraient toujours à heures réglées.
Le fonctionnement de ce mode de transport est assez simple en soi… Les voitures sont tirées par quatre chevaux et conduites par un cocher et un laquais. Bien qu’elles soient lourdes, elles ne comportent que huit places. Les arrêts se font uniquement sur demande, pour laisser monter ou descendre les voyageurs tout au long du trajet.
Après la requête de l’entreprise, les carrosses sont officiellement institués par un arrêt du Conseil du Roi le 19 janvier 1662. C’est le roi Louis XIV qui signe lui-même les lettres donnant l’autorisation d’établir ce nouveau service.
5 itinéraires pour traverser Paris
Après quelques essais, cinq routes sont progressivement mises en place. La première relie la porte Saint-Antoine au Luxembourg en passant par la rue de la Verrerie, le pont au Change, le pont Neuf et la rue Dauphine. Hasard ou non, cet itinéraire relie justement la maison de Pascal aux hôtels de quelques uns de ses associés.
Quelques jours plus tard, une seconde ligne relie la rue Saint-Antoine à la rue Saint-Denis avec un passage par la place Royale (actuelle place des Vosges) et la rue des Francs-Bourgeois.
Le troisième itinéraire relie quant à lui le Luxembourg à la rue Montmartre par le pont Saint-Michel, le pont Neuf et la place des Victoires.
Quant au quatrième, il se démarque des autres itinéraires puisqu’il propose un trajet circulaire communément appelé « tour de Paris », ce qui n’est pas sans rappeler l’actuel Périphérique. À noter que son prix varie selon la longueur du parcours effectué.
Enfin, le cinquième et dernier itinéraire relie le Luxembourg à la rue de Poitou par le pont Notre-Dame et la rue Saint-Martin. Au moins trois autres itinéraires étaient en prévisions mais ceux-ci ne verront jamais le jour à cause de la faible affluence.
Un concept aussi important qu’éphémère
En effet, malgré les effervescences et le succès des premiers jours, l’ambiance va fatalement redescendre. Très vite, l’entreprise se rend compte qu’elle n’a pas prévu assez de carrosses. Pour preuve, des Parisiens sont nombreux à laisser passer plusieurs carrosses avant de pouvoir monter dedans.
Malheureusement pour Blaise Pascal, le principal problème de son concept est qu’il est probablement « trop en avance sur son temps ». À cette époque, la population réside en grande partie sur son lieu de travail. Pas besoin donc de se déplacer dans tout Paris…
Il faut aussi ajouter que le concept ne fait pas l’unanimité au sein de la capitale. C’est le cas notamment de la noblesse parisienne, qui s’inquiète de devoir partager son trajet avec des personnes au rang social bien inférieur.
Les règles sont également sources de critiques puisque l’accès est par exemple interdit aux soldats, mais aussi aux pages ou aux laquais, ce qui crée une importante vague de protestations. Beaucoup ne comprennent pas une telle décision, d’autant plus que ces derniers représentent une importante partie de la population parisienne à l’époque.
Toutes ces mauvaises critiques ne cessent d’entacher la réputation du concept et de moins en moins de personnes se pressent dans ces carrosses. Afin de renflouer les caisses, l’entreprise a l’idée d’augmenter les tarifs, en passant à six sols, mais là encore, c’est un échec…
Blaise Pascal, un homme qui avait seulement deux siècles d’avance…
Au final, le concept ne dure que quelques années et, selon des textes de l’époque, disparaît aux alentours de 1677. Paris devra attendre plusieurs siècles avant de revoir le système des transports en commun. Quant à Blaise Pascal, il n’aura malheureusement pas le temps de profiter de son idée puisqu’il décède seulement quelques mois plus après l’arrivée des cinq itinéraires.
Quoi qu’il en soit, le célèbre mathématicien et philosophe reste considéré comme l’une des figures des transports en commun parisiens. Les carrosses à cinq sols présentent en effet de nombreux points communs avec nos transports actuels. Les véhicules suivent un itinéraire fixe, avec des départs à intervalle régulier et un tarif déterminé en fonction du trajet.
On peut aussi noter quelques situations “presque” similaires et amusantes entre le 17e siècle et notre époque. On ne parlera pas des difficultés à avoir de la place ou des nombreuses augmentations des tarifs mais à l’époque, le moindre trouble au bon fonctionnement du service était passible de coups de fouet. Aujourd’hui, pas de violences physiques mais un tel acte coûte tout de même plus de 100€ d’amende…
Crédits photo de une : Eurobridge
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