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Les secrets de la rue Montorgueil

Par Virginie

C’est l’une des plus anciennes, des plus animées et des plus belles rues de Paris. La rue Montorgueil contient mille et un trésors, entre histoire et faits insolites.

Une rue très ancienne

A cheval sur les deux premiers arrondissements de Paris, la rue Montorgueil est l’une des plus vieilles de la capitale. On estime que sa création remonte au Moyen-Âge, avant le XIIIème siècle. Quant à son nom, il est plutôt difficile d’en attribuer une origine, puisqu’il n’a jamais vraiment changé depuis cette époque. Le consensus estime qu’il provient du Mont Orgueil (Vicus Montis Superbi), une butte proche de la voie. Mais, détrompez-vous si vous pensez que cette butte est d’origine naturelle, car elle n’était ni plus ni moins qu’un amoncellement de détritus entre le Xème et le XVème siècle ! Les parisiens lui avaient donc donné ce nom de Mont Orgueilleux, puis Mont Orgueil, de façon ironique.

La cour des Miracles par Gustave Doré, illustration de la vision romantico-médiévale dépeinte dans Notre-Dame de Paris de Victor Hugo.

La rue Montorgueil a toujours été un lieu de passage très animé : elle accueille notamment à partir du milieu du XVIIème siècle les pêcheurs du nord de la France, venus apporter leur cargaison par la porte Poissonnière. Sans cesse animée, bruyante mais aussi sale et boueuse, la rue Montorgueil était située à proximité de la Grande Cour des Miracles, ce qui en faisait un lieu ou il n’était pas bon de se promener tard le soir…

Des lieux historiques

La pâtisserie Stohrer

Par son ancienneté, la rue Montorgueil a abrité de nombreux évènements et lieux historiques. Le plus célèbre d’entre eux est sans conteste la fameuse Pâtisserie Stohrer. Fondée au XVIIIème, il s’agit de la plus ancienne pâtisserie de Paris. En 1725, la princesse Marie Leszczynska, fille du roi de Pologne Stanislas Ier, arrive à Paris pour épouser le roi Louis XV. Dans ses bagages, elle emmène le pâtissier-cuisinier de son père, Nicolas Strohrer. Ce dernier s’installer en 1730 rue Montorgueil pour ouvrir sa pâtisserie où il vend ses spécialités.

Il y invente le baba au rhum, dérivé d’une pâtisserie polonaise. La légende raconte que le roi Stanislas Ier, en dégustant cette délicieuse pâtisserie, a décidé de lui donner le nom d’Ali-Baba, en référence au conte des Mille et Une Nuits qu’il était en train de lire…

L’Escargot de Montorgueil

C’est sans nul doute l’enseigne la plus originale de la rue ! L’Escargot de Montorgueil a ouvert ses portes en 1832 pour se spécialiser dans la cuisine bourguignonne et les mets à base d’escargots. Ayant conservé sa superbe enseigne en forme de grand escargot doré, ce restaurant contient également une magnifique décoration : son plafond de Georges Clairin, ornait le salon de la divine Sarah Bernhardt.

En presque 200 ans, l’Escargot de Montorgueil a vu passer les noms les plus prestigieux de Paris : Marcel Proust, Pablo Picasso, Charlie Chaplin et bien sûr, Sarah Bernhardt.

Au Rocher de Cancale

Le restaurant Au Rocher de Cancale fait partie de ces établissements dont on remarque immédiatement la magnifique devanture. Spécialisé dans les huîtres, le Rocher de Cancale a ouvert en 1804. Il a notamment été rendu célèbre par Honoré de Balzac dans sa fameuse Comédie Humaine. En effet, le restaurant y est évoqué à de multiples reprises car un lieux de rencontre entre ses différents personnages.

Durant quarante ans, Au Rocher de Cancale reste une référence dans la gastronomie du quartier et accueille des personnalités comme Alexandre Dumas ou Théophile Gautier. Il commence à décliner face à la nombreuse concurrence et est contrait de fermer ses portes en 1846. Il rouvre ensuite rue Richelieu avant de revenir à son emplacement de la rue Montorgueil.

L’arrestation de Jean Diot et Bruno Lenoir

Si vous faites partie de ces gens qui marchent dans la rue la tête baissée, vous avez peut être déjà remarqué cette plaque, située à l’intersection entre la rue Montorgueil et la rue Bachaumont. Elle témoigne d’un évènement historique qui fait froid dans le dos : le 4 janvier 1750, deux hommes nommés Jean Diot et Bruno Lenoir, âgés de 40 et 21 ans sont surpris : « en posture indécente et d’une manière répréhensible. »

Les deux hommes sont jugés et condamnés au bûcher, le 6 juillet suivant. Aujourd’hui érigés en martyrs LGBT, Jean Diot et Bruno Lenoir sont les dernières personnes exécutées, en France, pour homosexualité.

Une rue célébrée dans les arts

Nous l’avons déjà évoqué, Balzac a de nombreuses fois fait mention à la rue Montorgueil dans sa Comédie Humaine. Mais il n’est pas le seul. Dans Les Misérables, Victor Hugo évoque également cette rue. Il en donne même une nouvelle étymologie, en avançant que la rue doit son nom à l’« orgueil » (ancien nom pour cric), souvent utilisé dans cette rue. Toujours dans la littérature, Emile Zola cite dans Le Ventre de Paris l’auberge « Le Compas d’Or », dont l’entrée a aujourd’hui disparu.

Du côté de la peinture, les férus d’Impressionnisme connaissent très certainement le tableau de Claude Monet, sobrement intitulé « La Rue Montorgueil » et peint en 1878. Cette toile montre la rue noire de monde et ornée de milliers de drapeaux, à l’occasion de la fête nationale.

Monet dira à propos de ce tableau : « J’aimais les drapeaux. La première fête nationale du 30 juin, je me promenais rue Montorgueil avec mes instruments de travail ; la rue était très pavoisée avec un monde fou. J’avise un balcon, je monte et demande la permission de peindre, elle m’est accordée. Puis je redescends incognito ! »

 

Virginie Paillard 

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