Il était une fois… Paris coquine, Paris dévergondée, Paris sulfureuse ! Dans un passé pas si lointain, les maisons closes, lieux de tous les plaisirs, ont fait partie intégrante du paysage et du quotidien des Parisiens. Quelques-unes pensez-vous ? Plutôt 200 en réalité ! L’une d’elle, nichée dans un immeuble de 1837, était même spécialisée dans le sadomasochisme ! Remontons un peu le temps jusqu’à la bien nommée… Belle époque !
La Belle Époque… et ses bordels
On les appelle maisons closes, bordels, ou encore lupanars, en référence aux prostituées de la Rome antique qui étaient surnommées les “lupas” (les louves). Bannis, tolérés, réprimés, régulés… leur histoire a toujours été mouvementée. Et si Napoléon Ier légalisa la prostitution au début du XIXe siècle, c’est véritablement sous la 3ème République que les bordels connurent leur âge d’or. C’est ainsi qu’entre 1870 et 1940, Paris en comptabilisait (officiellement) 200 !
Parmi les établissements les plus emblématiques, on peut en citer quelques-uns. Au 12 rue Chabanais, dans le 2ème arrondissement, Le Chabanais vit régulièrement passer, entre 1878 et 1946, quelques personnalités de renom comme Salvador Dali, Guy de Maupassant, et même le Prince Édouard VII. Toulouse-Lautrec avait, lui, ses habitudes à La Fleur Blanche, situé 6 rue des Moulins, dans un immeuble de 1700 du 1er arrondissement, avec sa très réputée “chambre des tortures”. Dans cette maison de passe luxueuse ouverte en 1905, le peintre louait une chambre à l’année qu’il utilisait comme atelier pour peindre de nombreuses toiles sur lesquelles on retrouve des éléments de décor des lieux.
Autre bordel plus insolite, celui de l’Hôtel Marigny, dans le 8ème, fréquenté par Marcel Proust, et qui était l’un des rares établissements à accueillir les hommes homosexuels qui pouvaient sélectionner leur partenaire à travers un miroir sans tain ! On peut également citer le célèbre One-Two-Two dont la particularité était de proposer une décoration à la thématique différente pour chacune de ses 22 chambres.
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Que reste-t-il de nos amours…
S’il ne reste aucun vestige des maisons closes précédemment citées, il en va autrement au 32 rue Blondel, dans le 2ème arrondissement. Les incroyables mosaïques érotiques, fresques, immenses miroirs et “tableaux vivants” qui faisaient la réputation de l’établissement Aux Belles Poules ont en effet été conservés, et même rénovés, et le lieu est de toute beauté. Ne vous emballez toutefois pas, il ne s’y passe plus rien de sulfureux puisque le lieu accueille aujourd’hui des évènements et réceptions privées. Véritable joyau Art-déco, Aux Belles Poules est toutefois inscrit au titre des monuments historiques depuis 1997.
Mais alors, que sont devenus ces lieux de plaisir et de débauche qui ont tant fait parler, et plus si affinités ? Le 13 avril 1946, la loi Marthe Richard, du nom de l’ancienne prostituée et conseillère de Paris qui l’a déposée, imposa la fermeture de tous les lieux de prostitution en France. Cette loi, toujours en vigueur aujourd’hui, lui valut le pétillant surnom de “La Veuve qui clôt”, en référence au célèbre champagne qui coulait à flots dans ces espaces de libertinage. Les quelques 200 maisons closes éparpillées dans la capitale n’eurent alors d’autre choix que de mettre la clé sous la porte. La plupart ont été revendues à des particuliers qui leur ont offert une nouvelle vie, nettement moins sulfureuse ! Quant au mobilier et à la décoration intérieure de ces établissements, ils ont été vendus aux enchères quelques années plus tard. L’une d’elles, toutefois, a conservé son écrin intact…
Chez Christiane, maison close spécialisée dans le sadomasochisme
C’est dans le 9ème arrondissement de la capitale, dans l’ancien et voluptueux quartier Bréda, situé au pied de la butte Montmartre, que se trouve la seule maison close dont l’extérieur est parfaitement conservé. Rendez-vous Chez Christiane, au 9 rue de Navarin, face à l’hôtel Amour que son enseigne en néon rouge rend impossible à manquer. Cette superbe façade néo-gothique avec ses fenêtres en ogive semble sortie tout droit du Moyen-Âge.
C’était d’ailleurs le cas à l’intérieur également puisque ce bijou architectural reproduisait le décor d’un château médiéval avec ses salles de tortures munies de chaînes, de colliers de fer, menottes et même de gibets, ces structures qui étaient utilisées pour les exécutions par pendaison ! Madame Christiane y recevait les amateurs de sensations fortes la cravache à la main, puisque le lieu était spécialisé dans le sadomasochisme ! “Rien n’y manque” était-il même écrit dans le Guide des maisons d’amour et des musées secrets de 1935… Les temps changent…
Ancienne maison close Chez Christiane
9 rue de Navarin
75009 Paris
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Photo en Une : Maison close Chez Christiane à Paris © Flickr Clementinos2009
Mélina Hoffmann