Lorsqu’on dit Gustave Eiffel, on pense évidemment tout de suite à la Tour Eiffel, cette emblématique tour de fer de 330 mètres de haut construite par le célèbre ingénieur et industriel français à l’occasion de l’exposition universelle de 1889. Dans un second temps, on pense aussi à la non moins emblématique Statue de la Liberté, à New-York, offerte aux américains par le peuple français en signe d’amitié quelques années plus tôt. En revanche, on pense beaucoup moins, voire on ignore souvent, qu’une autre œuvre exceptionnelle de Gustave Eiffel se trouve en France. Un ouvrage classé qui a même servi de modèle pour la Tour Eiffel ! On vous emmène la découvrir…
Un petit air de Tour Eiffel
Pour admirer cette création méconnue de Gustave Eiffel, il faut s’éloigner un peu de Paris et rejoindre le Cantal, dans la région d’Auvergne-Rhône-Alpes. C’est dans un cadre naturel exceptionnel, au cœur des Gorges de la Truyère, réputées pour leur beauté sauvage et d’où surgissent de nombreux torrents, que se tient un véritable chef d’œuvre en métal de 564 mètres de long et 122 mètres de haut. Immédiatement, et malgré son horizontalité et sa couleur rouge singulière, son architecture entièrement métallique et sa forme parabolique font penser à la Dame de fer.
Quoi que, sa couleur rouge Gauguin entretient bien un lien avec la Tour Eiffel puisqu’il s’agissait de la couleur initiale de cette dernière ! Une teinte parmi les plus utilisées à la fin du 19e siècle. C’est toutefois entre 1992 et 1998 que le viaduc fut ainsi repeint, pour raviver sa peinture et gommer l’apparition de rouille sur les parties les plus exposées aux intempéries. Un “petit” rafraîchissement qui nécessita tout de même 38 tonnes de peinture !
Un géant d’acier
Il semble si léger… et pourtant, ne vous y méprenez pas. Bâtir cet édifice de 3169 tonnes qui enjambe la rivière avec son arche de 125 mètres de long fut évidemment un défi de taille pour l’époque. Son but : traverser les profondes Gorges de la Truyère jusqu’alors infranchissables, et désenclaver ainsi le Massif central en prolongeant la ligne SNCF de Paris jusqu’à Béziers. Pour sa construction, l’ingénieur Léon Boyer s’est inspiré du viaduc Maria Pia, à Porto, au Portugal, avec lequel l’entreprise de Gustave Eiffel avait remporté un concours international pour un pont ferroviaire grâce à son arche permettant de franchir une gorge encaissée. Un procédé révolutionnaire pour l’époque, qui avait alors fasciné toute l’Europe.
Le chantier pour y parvenir dura quatre années, de 1880 à 1884, et mobilisa pas moins de 400 ouvriers, français et italiens qui travaillèrent sans échafaudage à l’assemblage des structures métalliques à l’aide de plus de 650 000 rivets jusqu’à faire se rejoindre les deux parties de l’arche, le 27 avril 1884. Les pièces de métal étaient fabriquées dans les ateliers de Levallois-Perret, puis acheminées en train jusqu’à la gare la plus proche. De là, et sur une trentaine de kilomètres, des chariots tirés par des bœufs ou des chevaux finissaient de les acheminer.
Le Viaduc de Garabit : un ouvrage classé
Au moment de sa construction, le Viaduc de Garabit s’inscrivit tout de même comme le plus grand ouvrage métallique du monde ! Il dut pourtant attendre 2017 pour être classé Monument Historique. Depuis lors, une procédure de candidature est en cours pour accéder au niveau supérieur, à savoir un classement au patrimoine mondial de l’UNESCO. Une procédure qui réunit six viaducs métalliques à grande arche en France, en Italie, en Allemagne et au Portugal, et dans laquelle on retrouve également le viaduc de Viaur, qui enjambe quant à lui les gorges sauvages de la vallée du Viaur, dans le Sud du Massif central.
L’ouvrage fait également partie, aux côté du pont du Gard, du pont du Diable, du viaduc de Millau, et du pont Valentré de Cahors des “Ponts remarquables du Sud de la France”. Un réseau qui rassemble et valorise des ouvrages d’art remarquables par leur prouesse technique, leur histoire, ou leur ancienneté, classé, labellisés ou bénéficiant d’une notoriété et de flux de visiteurs importants.
Parfois surnommé “La Tour Eiffel du Cantal”, le “Géant de fer” ou encore le “Géant d’acier”, le Viaduc de Garabit se contemple de la route en contrebas, ou depuis la rivière lors d’une balade en bateau. Il n’est évidemment pas possible d’emprunter le pont à pieds puisqu’il est réservé à une ligne de chemin de fer. Si vous êtes de passage dans les environs, ne manquez pas d’aller l’observer également à la tombée du jour. Cette superbe création qui servit en quelques sortes à Gustave Eiffel d’entraînement à la construction de la Tour Eiffel, est en effet éclairée tout ou partie de la nuit selon la période de l’année, ce qui lui apporte un peu de magie supplémentaire.
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Photo en Une : Viaduc de Garabit ©AdobeStock_JackF
Mélina Hoffmann